Des couleurs pour éloigner les peurs
A la croisée du rituel et de l’amulette, frontières entre le monde extérieur et les pensées, les masques sont symboliques, renferment de nombreux mystères et constituent un langage complexe et singulier. Que l’on peut s’amuser à déchiffrer ou à inventer…
Chaque enfant a donc inventé son propre masque protecteur, celui qui à la fois abrite ses rêves et ses cauchemars, repousse les angoisses pour faire éclore la magie.
“Il est à New-York, un lieu magique où les rêves de l’enfance se sont donné rendez-vous ; où des troncs séculaires chantent et parlent ; où des objets indéfinissables guettent le visiteur avec l’anxieuse fixité de visages ; où des animaux d’une gentillesse surhumaine joignent comme des mains leurs petites pattes, priant pour le privilège de construire à l’élu le palais du castor, de lui servir de guide au royaume des phoques, ou de lui enseigner dans un baiser mystique le langage de la grenouille ou du martin-pêcheur. Ce lieu, […] on le visite tous les jours à l’American Museum of Natural History : c’est la vaste salle du rez-de-chaussée consacrée aux tribus indiennes de la côte nord du Pacifique qui va depuis l’Alaska jusqu’à la Colombie britannique.
[…]
Pour les spectateurs des rites d’initiation, ces masques de danse qui s’ouvrent soudain en deux volets pour laisser apercevoir un second visage, parfois un troisième derrière le second, tous empreints de mystère et d’austérité, attestaient l’omniprésence du surnaturel et le pullulement des mythes.
[…]
Car presque tous ces masques sont des mécaniques à la fois naïves et véhémentes. Unique en son genre, cet art réunit dans ses figurations la sérénité contemplative des statues de Chartres ou des tombes égyptiennes, et les artifices du Carnaval.”
Claude Lévi-Strauss, La voie des masques
D’un point de vue technique, les enfants ont découvert la gravure et le monotype sur rhénalon sur grand format (50 x 65 cm). C’était dans un premier temps délicat pour eux de décomposer leur masque en différentes formes distinctes (c’est quelque chose que je leur avais demandé) à encrer séparément, qui constitueraient ensuite un tout. Mais je pense que c’est un exercice d’abstraction intéressant, qui leur a permis de se surprendre, ce qui est selon moi très important, et valorisant. Se projeter sur un grand format n’était pas facile non plus, prendre de la place, laisser son dessin s’épanouir..
Et encrer des matrices transparentes n’était pas de tout repos, plusieurs morceaux ont disparu, leur jouant des tours de caméléon dans toute la classe..!