Semaine du 20 février
Trois semaines après notre première venue à Beaurevoir, nous nous retrouvons pour retranscrire nos premières impressions de mémoire. Sans un mot, sans un échange, nous multiplions les supports, les outils et les techniques de représentation pour coucher sur le papier les images mentales qui nous obsèdent depuis le départ. Impatientes, nous passons d'une technique à l'autre sans même vouloir finir le travail entamé. Aquarelles, pyrogravures, collages, dessins à l'encre, compositions à la photocopieuse, maquettes, créations au fusain et au pastel, les productions s'empilent au fur et à mesure, à même le sol, sans considérations aucunes. Le trait doit être rapide, la couleur vive, les images doivent sortir au plus vite, pour tourner la page.
Certains essais attirent pourtant notre attention. L'une revient de manière perpétuelle à la question du déséquilibre et du parcours, elle s'intéresse au vent tournoyant, aux mouvements de sol et aux lignes qui se dupliquent dans le paysage. L'autre s'attache à analyser et déconstruire les détails et les motifs qu'elle a pu observer sur le site, elle relève les traces de tracteur dans les champs, la multiplication des lichens jaunes sur la pierre et les herbes épaisses couchées par le vent. Les essais deviennent de plus en plus abstraits, nous nous perdons dans les méandres de notre mémoire. Puis, le vide, plus rien.
Epuisées, nos premières inspirations ne laissent place à aucune envie. Nous décidons alors d'analyser ces premiers travaux. Brouillons, inachevés, ces retranscriptions de mémoire relatent davantage nos sentiments que nos sensations. Elles traduisent notre agacement, notre perte de repère et notre tension, comme si ces sentiments fonctionnaient de manière autonome, sans lien avec le site. Sans consignes, nous nous sommes égarées dans nos propres recherches.
Quelques pistes pour la suite
Deux questionnements émergent de ce premier temps de recherche. D'une part la confusion qui s'exprime dans nos productions relate la complexité qu'il existe entre nos sentiments, nos sensations et un site qui ne saurait exister sans notre expérience corporelle. D'autre part, la difficulté de l'exercice remet également en question notre approche : comment représenter, communiquer de manière graphique et donc visuelle une expérience qui elle est corporelle?