Passerelles #2

Passerelles #2

Publié par Alexandra Lucchesi-Frébault

Journal du projet

Présences & Présents

Depuis le 28 février dernier, je me rends chaque semaine à l'école du Luxembourg à Vesoul.

Je quitte mon domicile très tôt le mercredi matin, la route est sombre et bien souvent, je roule entourée des vapeurs de la nuit. Et puis toujours, après l'opacité, la gouache : dans un mouvement lisse et continu se succèdent le noir, le bleu encre, le gris, le vert, le mauve, le rose, jusqu'à la montée du soleil dans le ciel, orangé, irréel.

Ce rendez-vous avec ce qui me fait penser à un œuf au plat intergalactique est une grande joie qui me donne de l'élan et qui résonne avec une autre : celle d'aller retrouver mes compagnons d'aventure qui m'attendent derrière leurs petits bureaux.

Ensemble, et depuis le 28 février dernier, nous farfouillons, nous cogitons, nous tentons, nous tâtonnons, nous osons, nous expérimentons, nous nous surpassons, nous nous surprenons, nous nous amusons, nous nous considérons, nous nous observons, nous nous décryptons.

D'une séance à l'autre, je conçois des ateliers-laboratoire au cours desquels les enfants sont libres de s'exprimer et de proposer quelque chose. La dynamique du projet – et c'est une donnée qui m'importait beaucoup- se construit avec eux et à partir d'eux.

Via le prisme d'exercices techniques (la voix, le corps dans l'espace, l'appréhension de ce qu'est le théâtre), de temps d'écriture (textes chantés, pensées, avis), d'improvisations diverses autour du thème du Roi Gros, de captations de matériaux sonores et de temps dit « de bienveillance » pour fédérer la classe, les élèves tricotent leurs parcours au fur et à mesure en fonction de ce qu'ils offrent et de ce qui émerge et les interpelle.

Je les trouve enthousiastes, joyeusement avides, courageux, intelligents, curieux et très très vivants -quelques fois un peu trop, mais la vie qui déborde est toujours plus réjouissante que l'apathie, isn't it?-.

J'ai la chance, et le plaisir, de collaborer avec des enseignantes qui me font confiance et qui disposent de qualités humaines rares qui me touchent infiniment. Il faut dire le très grand souci qu'elles ont de leurs élèves, la bienveillance qui est la leur et cette posture juste, subtil équilibre entre l'autorité nécessaire et structurante et la présence lumineuse, qu'elles arborent à chaque instant.

Cette aventure de théâtre et d'humanité est un cadeau ; à travers elle, ce sont la vitalité et la richesse intérieure de toutes ces jeunes personnes en devenir qui me sont réverbérées.

Il y a là de quoi se réjouir d'être vivant.