Le cyanotype est un procédé photographique monochrome ancien. Par le biais duquel on obtient un tirage photographique unique bleu de Prusse ou bleu cyan.
La solution photosensible que l'on utilise est composée de Citrate d'ammonium ferrique et Ferricyanure de potassium, une fois préparée la solution peut être appliquée sur différentes surfaces (avec les enfants nous utiliserons du papier). Toute cette partie du procédé doit être effectuée dans l'obscurité. Une fois sèches, les feuilles présentent une couleur jaune/verte qui deviendra d'un bleu très vif lors de l'exposition aux UV. La couleur obtenue varie selon l'intensité des UV mais aussi la durée d'exposition.
Cyanotype de l'algue brune Dictyota dichotoma d'Anna Atkins (1799-1871)
J'explique ce procédé aux enfants tout en leur précisant que je réaliserai la partie chimique en amont (pour des raisons de sécurité). Chaque enfant devra réaliser un cyanotype à partir d’éléments végétaux et/ou minéraux glanés aux alentours de l’école.
Je leur répète que les compositions devront être réalisées à l’abri de la lumière car les UV sont très forts en Martinique et le papier y est très sensible!
Une fois nos compositions prêtes nous devrons les insoler c’est-à-dire les exposer au soleil. Les rayons UV permettront à l’image de se former sous leurs yeux.
Cela nous amène à aborder la question de la photographie argentique et de la matérialité de l’image. Même si ils sont très habitués à prendre des photos et se prendre en photo via smartphone ou tablettes, peu d’enfants «à part chez Mamie» sont confrontés à des images tirées ou imprimées. Ils ont d'ailleurs du mal à croire que les cyanotypes soient des photographies.
« - C’est sûr c'est une peinture ça madame Pauline!!» s'exclame l'un des enfants!
Ash Ferlito devant son travail
Afin d’illustrer mes explications, je leur montre les œuvres d’Ash Ferlito, jeune artiste américaine. Ash Ferlito est artiste mais elle possède également une formation de botaniste. Grâce à une très grande maîtrise du procédé et de nombreuses expérimentations, elle crée un système qui lui permet de réaliser des cyanotypes à partir d’ombres d’insectes qu’elle attire grâce à de la lumière. L'installation qu'elle a confectionnée est mobile ce qui lui permet de réaliser des œuvre dans des endroits très différents (en France, en Equateur, à New-York, en Californie...). En travaillant avec l'environnement naturel qui l'entoure, elle met ainsi en avant la grande diversité d'insectes qui existe entre les différents endroits où elle se déplace, et par là l'importance de la biodiversité.
Détail d'une œuvre d'Ash Ferlito
Les enfants sont très impressionnés et ils ont hâte d'essayer.
Mais... beaucoup ont peur des insectes, d'autant qu'en Martinique ils sont souvent dangereux! Je les rassure, nous allons nous aussi utiliser l'environnement qui nous entoure pour travailler mais à partir de végétaux et non d'insecte!
Nous partons donc en quête d’élément qui nous serviront pour les compositions.
D’abord dans le jardin de l’école puis...à la plage. Les enfants sont ravis de cette sortie même si la plage est au bout de la cour de récréation.
Au début ils sont dubitatifs et ont du mal à évaluer le "potentiel" des éléments qu'ils trouvent, petit à petit ils se prennent au jeu et nous remplissons deux gros sacs avec nos trouvailles.
Sans prévenir il se met à pleuvoir très fort, nous devons rentrer à la hâte à l'école.
Les enfants se jouent de ma surprise « C’est comme ça ici! C’est la Martinique! ».
Les enfants ramassant des éléments végétaux et minéraux sur la plage du Prêcheur.
