Maintenant que chaque objet a trouvé sa place, nous allons, à coup de baguette magique, transformer ces objets en images pour qu’ils se fondent dans les murs, le sol, le mobilier ou autres éléments de la Micro-Folie. Nous utiliserons pour cela le principe de l’anamorphose, qui joue avec la perspective pour faire apparaître une image selon un seul point de vue.
Avant la pratique, il faut comprendre ce qu’est une anamorphose et quelles sont les différentes manières d’utiliser cette technique.
Nous nous retrouvons à la Micro-Folie pour une séance de médiation sur le tableau de Hans Holbein, Les ambassadeurs, avec Pascale, la médiatrice de l’association ADATER. J’avais déjà abordé rapidement ce tableau avec les enfants lors de ma première venue, mais cette fois, il est question de l’approfondir, de prendre le temps de repérer dans le détail ce qu’il raconte. En effet, ce tableau renferme de nombreux indices qui, si on les observe tous attentivement, nous racontent l’histoire des deux personnages représentés sur la toile.
C’est sur ce principe que nous aussi, nous utiliserons des objets disséminés dans l’espace d’exposition pour raconter une histoire.
C’est à mon tour d’intervenir, pour la deuxième partie de cette médiation, centrée cette fois sur l’anamorphose et sur comment les artistes s’en servent pour faire raconter des choses aux espaces dans lesquels ils interviennent. De la pyramide du Louvre plongée dans les entrailles de la terre par JR en 2019, aux sculptures d’amphibiens difformes de Jonty Hurwitz, que l’on ne peut identifier qu’en les regardant dans un miroir cylindrique, les enfants apprennent à reconnaître deux types d’anamorphoses: obliques et cylindriques.
Certains commencent à faire des rapprochements avec leurs propres dessins d’espace de notre atelier précédent: comme la pyramide du Louvre, la pièce de Jean nous donnera l’illusion d’être tombée dans un fossé. Et le vélo de Marceau, comme la signalétique routière destinée aux cycliste, sera dessiné pour être vue du dessus, comme quand on est sur la route.
Il est temps maintenant de construire nos anamorphoses, à partir de grilles de perspective: chaque enfant reçoit la sienne, dont la forme dépend de l’endroit où il a situé son objet de ce qu’il raconte: la peluche de Kyara, qui sera vue de côté, sera donc une anamorphose oblique, et le fer à cheval de Charline, qui doit être montré à l’envers, sera une anamorphose cylindrique, car cette technique donne l’image à voir en miroir.
Comprendre le fonctionnement de la grille et reporter des points de repère au bon endroit prend parfois un peu de temps, et cela semble les perturber de dessiner un objet volontairement déformé. J’entends à plusieurs reprises: « Je n’y arrive pas, mon dessin est faux ».
Pourtant, si l’on regarde la grille, ils ont tout juste. La déformation produit chez eux le sentiment d’avoir raté, et certains terminent leurs dessins peu convaincus. J’ai beau leur dire qu’ils ont parfaitement réussi à recréer une anamorphose, ils ne me croirons pas avant d’avoir vérifié de leur propres yeux. Et en effet, en affichant leurs dessins au mur et en le regardant sous le bon angle, ils retrouvent leurs objets parfaitement proportionnés, comme sur leur photo.
La technique utilisée par le grand peintre Hans Holbein n’a plus aucun secret pour eux!
Nous choisissons de donner une autre dimensions à certains objets: ils joueront avec l’architecture du lieu, à cheval entre plusieurs murs ou éléments de la Micro-Folie. Pour cela, utiliser une grille devient compliqué: nous nous munissons donc d’un vidéo-projecteur pour voir comment tromper l’œil du spectateur sur des surfaces complexes, comme des troncs d’arbres ou des murs en angle. La lentille du vidéo-projecteur devient alors notre œil, et nous sert à définir le point de vue.