1 pas = 1 mètre

Les écoliers (se) mesurent à leur vaste cour

Connaître et fréquenter un lieu ne signifie pas forcément savoir se le représenter. Encore moins le dessiner en plan. Projection peu utilisée par les écoliers, le plan est une lecture codée de la réalité. Comment les enfants traduisent leur cour de récréation par cet outil qui transforme l’espace -trois dimensions- en un agencement -deux dimensions- quasi géométrique de lignes, traits, points, angles et biais ?

Avant toute chose, les mesures ça rassure ! Alors beaucoup s’attèle à la tâche, on sautille, on « pas chassé », on « grand écart » avec pour intention de découvrir sa cour par des données plus techniques, plus tangibles. On ordonne, on classe « les poteaux sont alignés, la marelle arrive au niveau du préau, la fenêtre de l’ABC est à côté de l’arche ». On assimile maintenant d’une manière nouvelle la relation entre tel et tel élément, on s’intrigue de quelques hauteurs… « Ah oui 21 mètres, j’aurai dit plus ! »

Puis avec une rigueur presque cartésienne, les élèves épris de cartographie vont plus loin encore, plus loin que les murs de la cour de « récré » ; ils se mettent à deviner le nord, se demandent où est l’Atlantique, flairent le sud et déduisent le dernier point cardinal.

Après cette cure d’orientation, commencent les premières esquisses de plan sur papier. On tente une forme générale en L, le L devient un L retourné voir un Z. Le préau s’étire, la cour se tasse, les proportions reflètent alors davantage la perception personnelle et sensible du lieu plutôt qu’une dimension physique exacte. Mais finalement ces plans ne sont-ils pas plus « parlants » par leur capacité à nous dévoiler des préférences pour certains recoins, des usages précisés, des appropriations variées, une temporalité pour chaque espace ?

À moins d’être Icare ou un rapace, on oublie que le plan est une vue impossible…

Les écoliers (se) mesurent à leur vaste cour