Chemin forestier

RANDONNÉE THÉÂTRALE

Publié par Elise Boch

Journal du projet
Paysagisme Sociologie Théâtre Arts Plastiques, Photographie

Le territoire comme scène, la randonnée comme caneva narratif - Dernière séance avec les élèves accompagnés d’Axelle Grégoire

Ce choix atypique d’une forme théâtrale itinérante en pleine nature impose de réfléchir à la scénographie avec d’autres perspectives que celle du décor. Il ne s’agit pas de produire des objets ou d’autres éléments scéniques mais de réfléchir au matériau commun qu’est le territoire. Axelle Grégoire (architecte plasticienne) a donc utilisé son expérience en projet de paysage et en stratégie territoriale pour réfléchir à cette scénographie d’un nouveau genre. Le projet propose de fabriquer le territoire de la pièce en le racontant de manière nouvelle par les cartes, renverser le regard et faire apparaître d’autres éléments quitte à faire revivre des fantômes, à convoquer des paysages évanouis ou à se projeter dans un futur imaginaire.

 

La zone blanche n’est pas cartographiée, elle échappe à la représentation car elle est « déconnectée » du reste du monde. Elle est hors du récit contemporain. Ce qui s’y trouve, ceux qui y vivent échappent à la grande narration des territoires. Ce projet invite à l’exploration de ces zones par les cartes mais aussi par l’arpentage. Il s’agit de proposer au spectateur de s’infiltrer dans le blanc des cartes et de redécouvrir son territoire autrement.

À partir des outils cartographiques développés dans Terra Forma, manuel de cartographies potentielles1, des ateliers de dessin autour de la notion de terrain de vie ont été entrepris avec les enfants de l’école de Coulanges dans le cadre des séances du programme Création en cours. Ce temps d’expérimentation, où il s’agissait de tester ces nouveaux outils de description, a permis d’appréhender plusieurs notions : terrain de vie, ressources, dispersion des ondes, révélation de l’invisible, place du vivant et perception du paysage, partage du territoire… mais aussi d’interroger notre rapport à l’environnement et notre capacité à vivre collectivement dans cet espace-temps partagé.

 

À l’échelle du projet de création, ces séances ont permis d’élaborer un protocole de travail et de dessin pour le futur spectacle autour d’un récit d’exploration ; de la base vers un territoire élargi, du connu vers le moins connu, de l’habité vers le monde des non-humains, du monde interconnecté vers la zone blanche. Le protocole de dessin, ainsi défini, permet de développer des jalons dramaturgiques sur un territoire donné, caneva d’un développement dramaturgique in situ. À partir de ce territoire, l’idée est d’ouvrir le temps de création de ce récit pédestre aux différents acteurs en présence (commanditaires, habitants impliqués, équipe d’artistes et finalement spectateurs). Cadrées par des ateliers participatifs, ces phases d’acculturation au projet artistique et à la relecture du territoire sont comprises comme des étapes de la performance. Le projet Blind Spot propose, en effet, de développer collectivement le rapport entre territoire et écriture.

 

 

1Terra Forma, manuel de cartographies potentielles de Frédérique Aït-Touati, Alexandra Arènes et Axelle Grégoire paru en avril 2019 aux Éditions B42.