Créer dans les rapports d'échelle

Créer dans les rapports d'échelle

Publié par Naomi Melville

Journal du projet

Alors que les ateliers avec les enfants de l’école de Mahaut s’enchaînent, je commence à saisir la manière dont ils nourrissent mon travail et celle dont je les construis à la manière de ce travail.

Pour ce projet de transmission, j’ai décidé de travailler en deux temps, le premier étant axé sur la création d’une cartographie sensible, sous forme de fresque. Sa réalisation inclut le passage d’échelles microscopiques à des échelles macroscopiques. Après avoir dessiné des éléments végétaux que nous avions ramassés comme si nous les voyions à la loupe, nous passons au processus inverse. Les enfants retracent les trajets qu’ils effectuent quotidiennement. Cette étape achevée, j’installe un niveau d’abstraction plus élevé : et si nous réinventions, à partir d’éléments croisés chaque jour, de nouveaux types de motifs cartographiques ? Bien qu’ils aient d’abord cru que je leur demandais simplement de représenter ces éléments, la monstration de références d’art contemporain, d’artistes travaillant la cartographie, mais également de cartes historiques, les aide à la compréhension. Chacun réalise son motif que, pour s’y enfoncer plus profondément, nous réduisons à la photocopieuse, obtenant des planches de trames.

Ces premiers exercices sont à présent en cours d’application directement sur la fresque, que nous composons sur un des murs extérieurs de l’école. Je décide d’introduire quelques éléments de volumes, reliefs que nous réalisons en linoleum, mais également frontières.

Pour celles-ci, la première idée qui me vient est celle d’une corde vue en quincaillerie, en m’apercevant bien vite que je l’associe à celles dont sont faits les fouets, éléments traditionnels du carnaval. Suivant la ligne qui me pousse, dans mon travail personnel, à déconstruire des objets chargés de sens pour me les réapproprier, je propose un exercice de ce genre aux enfants. Je remarque une nouvelle fois que leur intérêt est au plus haut lorsque nous abordons leur culture ; ainsi, tous sans exception passeront plusieurs heures à détisser et recomposer des éléments à l’aide de fibres de cordage, que nous fixerons ensuite au mur.

 

De mon côté, j’achève une pièce, en tissage également ; la mise en parallèle de la vague carnavalesque balayant la Guadeloupe lors des jours gras et de celles du cyclone jetant les arbres à terre me fait construire un filet. Son centre se compose de tissu extrait de palmes, son extérieur d’un fil de dentelle utilisée pour les costumes du carnaval.

Les enfants passent dans mon lieu de travail, me questionnent. Leur expliquer me fait abolir les éléments inutiles et aller au plus évident de ma réalisation. La productivité de l’échange se confirme.