La nature est un designer extraordinaire. Alliant performance et durabilité, elle a beaucoup à nous enseigner. C’est par l’entrée du biomimétisme que je souhaite aborder cette résidence. J’ai pour ambition d’initier les élèves aux méthodes du design par une démarche inductive: l’observation et l’étude de cas concrets leur permettront de comprendre comment certaines stratégies du vivant sont utilisées pour répondre à des besoins humains. Une fois leur imagination stimulée, nous passerons à la pratique: il s’agira de chercher, au sein de l’établissement, des problèmes à résoudre, puis de s’inspirer des interactions et des équilibres existants dans les écosystèmes naturels afin d’inventer, concevoir et fabriquer des solutions concrètes.
La nature a des millions d’années d’évolution d’avance sur notre industrie moderne. Elle a résolu de nombreux problèmes, le tout de manière vertueuse. Il semblerait d'ailleurs que la plupart des inventions humaines que nous connaissons existaient déjà dans la nature. Nous avons donc intérêt à imiter le génie du vivant si nous souhaitons tendre vers un développement durable.
Grâce à ce projet de résidence, je souhaite prendre le temps d’observer de plus près la biodiversité et l’environnement local pour essayer de mieux les comprendre et les valoriser lors de projets à venir. Ayant entamé précédemment des recherches autour du biomimétisme (l'imitation technique des processus, des formes, des matières, des propriétés et des fonctions mis en œuvre par la nature), il m’importe de poursuivre l’exploration et l'apprentissage de cette démarche en la partageant avec des enfants.
Outre le fait de confronter mon approche à un regard nouveau, plein d’imaginaires et d’insouciance, ce qui me pousse à collaborer avec eux, c’est l’idée de penser et de faire plus simple, plus ludique, plus compréhensible et mémorable.
De leur coté, ils découvriront de nouvelles sources d’inspiration pour leur vie de tous les jours et développeront leur créativité, leur empathie, leur sens critique, leur débrouillardise et leur habileté manuelle en se mettant dans la peau d’un designer. J’aimerai également leur faire prendre conscience de la richesse la nature et de l’importance de la préserver et de la régénérer.
Nous commencerons le projet par une phase de découverte et d'initiation à ce mode de pensée en jouant à un jeu de cartes conçu au préalable pour l'occasion. Il s'agira probablement d'une adaptation du jeu Biomimicard. Chaque équipe sera munie de «super pouvoirs» d’espèces animales et végétales et devra faire appel à son sens de l’observation et son imagination pour relever différents défis.
Une fois familiarisés avec ce raisonnement et en possession d'un grand nombre de données sur la biodiversité, nous passerons à la pratique. Les élèves questionneront et repenseront les fonctionnalités des espaces et des outils à leur disposition dans le but de les améliorer. Nous formerons par exemple des groupes de réflexion autour des espaces dédiés au travail, à la restauration, la récréation, le sport, la lecture, l’hygiène, l’entrée et la sortie, l’attente, etc. Nous porterons notre attention sur la fonctionnalité du mobilier, des objets ou des outils, mais aussi sur des notions de confort, d’ergonomie, d’ambiance ou encore de durabilité et d’économie de moyens.
Tels des explorateurs, nous partirons ensuite à la recherche d’espèces locales et tenterons de découvrir leurs «super pouvoirs». Nous classerons alors nos trouvailles en essayant de trouver des rapprochements avec les problèmes identifiés précédemment. Nous pourrons également imaginer d’autres applications qui n’auraient pas été évoquées.
Il s'agira ensuite de passer de l'idée au projet. J'accompagnerai les groupes à donner vie à leurs idées au travers d'ateliers dessin, collage, maquette, rédaction de scénario d'usage.
En fonction en fonction du nombre d'idées de leur échelle et de leur faisabilité, nous choisirons de concrétiser un ou plusieurs projets. Quoi qu'il en soit, ceux-ci devront être pensés pour être astucieux et vecteur de sens. Je veillerai à mettre en place une démarche écologique à toutes les étapes de création. Cela impliquera de remettre en question le choix des usages, des matériaux et des procédés de fabrication. Il s'agira également de prendre en compte le soucis de l’allongement de la durée de vie du projet et sa recyclabilité.
Nous pourrons par exemple réfléchir à des solutions de construction permettant de maximiser les ressources en apprenant à bâtir des structures hyper résistantes à partir de petites quantités de matériaux abondantes ou de déchets sur le modèle des nids d'abeilles ou encore des toiles d'araignées. Ou encore apprendre à transformer les déchets en ressources pour en faire de nouveaux matériaux. Mais aussi utiliser des sources d'énergie abondantes et en libre accès comme la lumière du soleil, la chaleur, le froid, et certains flux: la pluie, le vent, le mouvement. Nous travaillerons également sur la résilience de nos projets, c'est-à-dire leur capacité à s'adapter aux changement des besoins et envies de leurs usagers. Nous pourrons pour cela s'inspirer des stratégies mises en place par les animaux pendant la parade pour créer un effet d'attachement aux objets et tenter d'allonger leur durée de vie. Ou encore imiter la capacité de certaines espèce à se camoufler pour rendre nos interventions discrètes et lutter contre le sentiment de lassitude. Enfin, à l’image des Lows Techs, nous pourrons imaginer le projet comme une innovation technique simple, répondant à des problématiques vitales, économiques ou environnementales (ex: récupérateur d’eau de pluie, frigo du désert, composteur, moyen de chauffage/climatisateur, etc).
Toutes ces pistes de réflexion ne sont que des projections, les idées et les projets naîtrons sur le terrain en fonction de mes échanges avec les enfants, mais aussi des ressources disponibles et des besoins identifiés.
Pour ce qui est de la production, j'assurerai le prototypage et la fabrication de mon coté et nous nous chargerons de l'assemblage du montage et des finitions en classe. Je ferai en sorte de réaliser le maximum de ces étapes au sein de l'école même si quelques étapes de fabrication devront certainement être réalisé à l'extérieur. En fonction du lieu de fabrication, je proposerai une seconde sortie scolaire pour visiter des espaces de fabrication (fablab, atelier de travail partagé) ou rendre visite à des artisans du territoire. Ce sera l’opportunité de leur faire découvrir et expérimenter les outils à commande numérique ou encore des savoir-faire à préserver ou en voie de disparition, dans le but de susciter des vocations ou d’éveiller de nouvelles passions. Sinon, je réaliserai un reportage video pour que les enfants puissent comprendre et visualiser comment leurs idées se seront matérialisées.
Nous terminerons enfin la résidence par le montage d'une petite exposition ouverte au public pour retracer toute la démarche menée au cours de cette expérience qui je l'espère sera fort enrichissante.
Par le(s) artiste(s)