Ce projet est à envisager comme la poursuite de ma recherche entamée lors de mon projet de diplôme aux Arts Décoratifs de Paris. Il allie la conception de signes et de symboles, à l'écriture d'un scénario et la réalisation d'une série de vidéos. D'après des articles de journaux choisis, il s'agit de constituer un vocabulaire d'images et d'objets illustrant les différents acteurs et paramètres d'une actualité spécifique. Une fois réalisés, ces objets sont mis en scène à travers de courtes vidéos qui racontent et expliquent "ce qui se passe" autour de nous. Il s'agit de développer de nouveaux systèmes de narration par l'image et de proposer de nouveaux supports pour raconter l'actualité à l'heure des réseaux et à l'ère de la sur-information. On peut l'envisager à la fois comme un outil éducatif permettant une vulgarisation d'informations parfois complexes mais aussi comme un moyen de "raconter des histoires" et interroger le vrai du faux.
À propos de ce qui se passe est une tentative d'écriture multimédia . Un système de signes combinant photographies, dessins, pictogrammes, chiffres, mots, qui pourra s'éprouver sous tout type de supports : de la vidéo, du gif, d'un post sur les réseaux, à une carte postale, une affiche ou un journal imprimé, voire à une performance en direct. L'ensemble de son lexique est conçu d'après un vocabulaire tiré d'articles de journaux choisis. Pour se faire, À propos de ce qui se passe existe sous la forme d'objets manipulables. Des images qui se supportent elles-mêmes, et qui proposent ainsi un retour à la photocomposition. À l'aide d'un smartphone, d'une tablette, d'un appareil photo, ou d'une webcam, il est possible de fabriquer par combinaison, des images qui racontent, illustrent, ou métaphorisent, ce qui se passe autour de nous. L'ensemble vous évoquera peut-être un jeu de monopoly ou de stratégie militaire. Pour d'autres, il rappellera les longues séances de jeu, où enfant vous reconstruisez un monde avec vos legos, et vos figurines en plastiques. Car c'est bien cela dont il s'agit : un moyen de manipuler le monde pour mieux le saisir."
Voilà la description que j'ai faite, il y a maintenant plusieurs mois du projet que j'essayais de mettre en place. Il a naturellement beaucoup évolué.
À propos de ce qui se passe, se passera ou pourrait se passer, s'envisage comme la poursuite de ce projet entamé en octobre 2017 et qui doit se voir grandir et prendre de nouvelles formes.
En tant que graphiste, ce projet consiste avant tout en la conception et la fabrication de signes assimilables par tous. Un autre système d'écriture en quelque sorte, qui pourrait exister sous différents supports (vidéo, stopmotion, images fixes). La création de ce langage implique alors une certaine forme d'échange.
Cette année (2017-2018) j'ai eu la chance de collaborer avec une marionnettiste avec qui nous avons travaillé à la mise en scène et à la manipulation d'une première version de ce langage qui existe sous la forme d'objets tangibles. Il me semble intéressant maintenant d'élargir les collaborations autour de cet outil qui doit se voir grandir.
Très proche d'un jeu éducatif, d'un outil pour comprendre et s'expliquer le monde, ma rencontre avec les élèves était un moyen de le transmettre, et de continuer à le faire vivre.
"Ainsi, cher Stefano, je t'offrirai des fusils. Et je t'apprendrai à jouer à des guerres très compliquées, où la vérité ne se trouve jamais d'un seul côté, où l'on doit signer, à l'occasion, des armistices. Tu te défouleras, dans tes jeunes années ; tes idées s'embrouilleront un peu, mais des convictions naîtront lentement en toi. Puis, une fois adulte, tu croiras que tout cela n'aura été qu'un conte : le chaperon rouge, Cendrillon, les fusils, les canons, I'homme contre l'homme, la sorcière contre les sept nains, les armées contre les armées. Mais si d'aventure, quand tu seras grand, il y a encore les monstrueuses figures de tes rêves d'enfant, les sorcières, les kobolds, les armées, les bombes, les mobilisations générales, peut-être que tu auras acquis une conscience critique à l'égard des fables, et que tu apprendras à te mouvoir de façon critique dans le monde réel." Umberto Eco - Lettre à mon fils (ou version moderne de la Catharsis)
Si ce langage est basé et extrait de faits d'actualité bien réels, la forme qu'il prend et qui évoque les jeux de sociétés ou de legos, permet d'ouvrir vers l'imaginaire. Cet extrait du court texte d'Umberto Eco me paraît très proche de mes intentions : "Raconter des histoires" pour mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons, mais surtout en acquérir une conscience critique, essentielle je crois à l'heure où tous nous nous interrogeons sur la place et le rôle des médias.
La première étape de ce projet a abouti à une performance, une histoire manipulée.
La seconde, qui se réalisera avec les élèves de la classe confiée, consistera en la réalisation d'un court-métrage.
Les exercices filmés que nous concevrons ensemble en classe seront intégrés au scénario que nous écrirons. L'ensemble constituera le second épisode du projet.
Je souhaite continué mes recherches graphiques et formelles, qui continueront d'être issues d'articles de journaux et de faits d'actualité, tout en permettant d'agrandir mon lexique de formes. Parallèlement à cela, des questions d'écritures, de dramaturgie et de montage, vont naturellement se poser. Venant du design graphique, il me faut encore explorer ces pistes cinématographiques, audiovisuelles, si essentielles au travail du graphiste contemporain je crois, qui se voit confronter à de nouveaux types de médiums digitaux et interactifs.
Si la première étape de ce projet est restée assez proche d'un journalisme classique, je souhaite que la seconde étape du projet prennent un peu plus d'envol en proposant des récits complètement fictifs, voire rocambolesques, à partir d'un lexique qui se sera pourtant voulu journalistique. C'est ainsi que je viens compléter le titre de ce projet initialement intitulé "à propos de ce qui se passe" et qui devient dans le cadre de Création en cours "à propos de ce qui se passe, se passera, ou aurait pu se passer". En espérant ainsi, ouvrir avec les enfants les portes d'autres mondes possibles.
"C'est absurde de vouloir raconter des histoires merveilleuses, des fables intemporelles ancrées dans l'éphémère, dans l'écume des jours, dans l'horizon fermé du présent". Miguel Gomes dans ses "Milles et une nuits" chapitre 1 (couleur, 118 min — 2015).
Par le(s) artiste(s)
Par les participants