« Ex Movere », littéralement, c'est « remuer, bouger, mettre en mouvement ». C'est un projet de création littéraire hybride et composite. Avec la complicité du musicien Maxime Beaudet, il s'agit de plonger dans la dimension organique de mes textes et d'en présenter une courte forme performée. Dans son partage, ce projet vise à questionner et expérimenter le(s) mouvement(s) à l'œuvre dans le geste d'écrire. Si, dans l'expérience scolaire, chacun est amené pour écrire à s'asseoir sur une chaise face à une table devant une feuille et un stylo, activant essentiellement la tête, le bras et la main, j'amène ici les participants à voir comment l'écriture mobilise en fait l'ensemble du corps et s'initie dans des zones sensorielles qui restent à explorer. « Chercher l'inspiration » en travaillant sur son souffle, « se mettre en jambe » en se déplaçant dans l'espace, « focaliser son écoute » par le regard ; le projet « Ex Movere » vise à partager et transmettre une expérience de l'écriture liée à la conscience du corps, au travail de la posture et à la circulation des flux. Les élèves seront ainsi invités à traverser des séances d'écriture où éveil corporel, gestes et déplacements ont toute leur place. Les productions textuelles et plastiques de la classe seront valorisées par l'édition et la diffusion d'un fanzine.
"Ex Movere", littéralement, c'est « remuer, bouger, mettre en mouvement ». En français moderne, on retrouve le terme "émouvoir", qui accorde à l'émotion une place centrale, au détriment du phénomène physique. Mais en filigrane d'un texte, il y a toute une géographie intérieure et intime faite d'esquisses, de hachures, de reprises, de parenthèses, de frontières, de détours, de coupes ; un milieu organique également traversé en temps réel par des images et des lieux, des voix, etc. Sans que l'on y pense forcément, chaque moment d'écriture est une danse qui se déploie en dedans et en dehors de la page. Mais que se passe t-il lorsque l'écriture elle-même s'empare de la question du geste qui la créé ? D'où part le mouvement de l'écriture et quels objets protéiformes surgissent d'une reprise performée ? "Ex Movere" est un objet littéraire hybride et expérimental. Par un phénomène de capillarité, "Ex Movere" cherche à réinvestir les matériaux (textes et images) d'un récit poétique fragmentaire et à les mettre en tension sur l'espace du plateau via une performance. Ma pratique et mon expérience m'ont amené à saisir comment la littérature pouvait prendre place « hors du livre » de différentes manières et je souhaite explorer cette dimension dans le cas de mon manuscrit "Ressac". L'enjeu de cette recherche sera d'expérimenter la performativité intrinsèque de mon texte par un travail fin de son oralisation, de son esthétique visuelle et de sa mise en scène. L'écriture de ce manuscrit, innervée par mon approche du geste dansé, a pour ligne directrice un fort travail du rythme et du souffle ; "Ressac" vise à offrir au lecteur de véritables plongées, tissant des résonances entre sensations immédiates et résurgences mentales. On y entre par la voix d'une narratrice qui se dédouble, le texte étant tantôt porté à la première personne, tantôt porté à la troisième personne du singulier. Au fil de différentes plongées sensibles qui explorent un rapport teinté de fascination et de répulsion vis-à-vis de l'eau, motif central, une scène d'enfance vient comme hanter le texte en revenant avec insistance. Cette même scène se répète en changeant légèrement de focale à chaque fois, ce qui a pour effet de diffracter le récit. Dans son mouvement d'écriture même (flottements, téléscopages, fondus noirs, espaces blancs, fondus enchaînés), "Ressac" appelle intimement l'espace intensif du plateau. Dans ma démarche, je suis influencée par des pièces composite comme "Atem le souffle" de Josef Nadj, "Quoi ? L'éternité" de Guy Alloucherie ou encore "Seuls" de Wajdi Mouawad. Le carnet est également un motif central dans ma pratique comme dans mon esthétique, en ce qu'il a de transmédial, hétéroclite et universel. "Ex Movere" sera pour moi l'opportunité de prolonger la première performance de mon texte à la Maison de la Poésie en juin 2015 dernier, pour laquelle un micro-dispositif à quatre voix avait été pensé. J'envisage cette fois d'être seule en scène, mais de faire intervenir un dispositif vidéo ainsi que de nombreux enregistrements sonores en direct, pour accentuer l'effet de surimpression des voix et des images au coeur du texte. Par ailleurs, il s'agira pour moi de me ré-approprier la matière textuelle et d'en proposer une forme scénique incarnée, ce qui m'amènera à me poser la question de ce qui sera vraiment « lu » ou « donné à entendre » et de ce qui sera « donné à voir ». De la même façon, de nombreux danseurs et chorégraphes travaillent à partir du matériau littéraire et envisagent sa translation via le corps dansant par différentes voies. C'est également cette modalité qui me restera à trouver. Cette résidence de « création en cours » vise à se poser frontalement toutes ces problématiques et à les résoudre par la mise en pratique. Elle demandera donc un temps de recherche, d'écriture et de composition, à la fois hors et en scène, qui mobilisera de nombreux médiums (dessins, photographies, partitions, etc) et aura donc, par conséquent, une restitution sous une forme pluridisciplinaire.
Haute-Vienne
Par le(s) artiste(s)