Projet de recherche - Ouverture

Projet de recherche - Ouverture

Publié par Pauline Bailay

Journal du projet
  • Introduction

Un des embranchements de notre recherche nous a amené à nous intéresser au statut des objets dans l'habitat, et plus particulièrement à la manière dont certains objets peuvent formater notre quotidien, notre rapport aux espaces intérieurs, et conditionner notre imaginaire et notre vision même de l'habitat. Parmi le large panel de ces "objets d'intérieur", la domotique a retenu notre attention. En effet, nous la considérons comme l'étendard d'une vision spécifique et dominante qui s'impose à notre imaginaire commun : celle de la smarthome, c'est-à-dire la maison intelligente, connectée et robotisée.

 

  • La fiction comme moteur du projet

«Le design n’est jamais qu’une scénographie, une manière de matérialiser une certaine idée de l’univers, une façon de créer un nouveau territoire imaginaire comme le font un scénario cinématographique, une ambiance quelle qu’elle soit. Dans notre société postindustrielle qui dispose de tous les systèmes de transformation et de communication, l’unique territoire sur lequel l’homme a encore la liberté d’intervenir, c’est la fantaisie, l’imaginaire, la narration.»     Andrea Branzi dans la revue Architecture intérieure - Créé, Juin-Juillet 1988, pp. 12-13

En accord avec la pensée d’Andrea Branzi, nous croyons que les designer·euse·s ont un rôle à jouer dans la réinvention du monde. Nous voyons dans notre métier une occasion de penser en-dehors du système des objets et usages établis, et de donner vie à des fictions qui viendront se mêler à l’épaisseur du réel. C’est avec cette envie que nous avons mené notre exploration, et avec cette ambition que nous avons imaginé ce "projet d'ouverture" que nous présentons ci-après .

 

  • Plan B, alternatives à la vision dominante d'un futur de l'habitat robotisé

Nous nous sommes ainsi intéressé·e·s à ce que nous réserve la domotique dans "la maison du futur" : réseaux d’objets connectés, appareils électroménagers polyvalents et autonomes, systèmes de commande centralisés... Comme nous l'avons mentionné en introduction, nous nous sommes penché·e·s en particulier sur la façon dont cette domotique façonne nos environnements intérieurs et nos modes de vie. Par les usages qu’elle convoque évidemment, mais également par une uniformisation esthétique des objets qui nous entourent.

Les visions de l’habitat du futur transpirent les mêmes matériaux lisses, les mêmes couleurs fades, la même lumière immaculée, les mêmes sourires benêts face à des objets toujours plus connectés. Les codes esthétiques sont toujours les mêmes, montrant une seule et unique vision du progrès technique. On nous vend, selon les termes de Mona Chollet dans Chez-soi, de la «félicité domestique», toujours dans le même emballage. Des visions homogènes qui selon nous neutralisent les diversités esthétiques et verrouillent les imaginaires de manière criante.
Nous avons ainsi souhaité ouvrir les champs de ce que peut être l'habitat du futur, partant du postulat que "l'intelligence" de la smarthome  ne se résume pas à la robotisation, à la miniaturisation, à l’autonomisation et à la sur-connexion des objets.


Pour ce faire, nous nous sommes intéressé.e.s aux matériaux textiles dans l’habitat, comme substitut à certaines de ces technologies. Les propriétés intrinsèques de certaines fibres et la multiplicité des moyens de mise en forme qui existent aujourd’hui nous semble pertinent, d’une part pour repenser les usages, l’esthétique, l’organisation spatiale, l’importance du sensible dans l’habitat, mais également en terme de type de production des objets domestiques, à une époque où les enjeux environnementaux et économiques sont cruciaux.


Nous avons alors imaginé des objets textiles se présentant comme les personnages principaux de trois espaces fictionnels, qui, flirtant avec les frontières du réel, suggèrent d’autres chemins possibles du progrès technique dans l’habitat. Empruntant des codes au décor de théâtre ou de cinéma, nos scènes proposent, à travers d’autres constructions de l’habitat et du confort, de nouvelles esthétiques et une ouverture pour nos imaginaires.