2ème série de fonds, sur des formats plus larges (durée de fragment de chant plus longue)

PARTITIONS ORNITHOLOGIQUES 1

Publié par Guillaume Hermen

Journal du projet

Entrer dans les détails du son par la réalisation graphique

Il y a parfois de ces expériences qui, par la surprise du résultat perceptif qu’elles nous proposent, nous soufflent silencieusement au creux de notre oreille : « Continuez de suivre ce chemin, vous en trouverez des choses ! ». Suite à nos travaux d’écoute, de ralentissement et d’imitation de chants d’oiseaux naît naturellement l’envie d’aller plus loin, d’approfondir ensemble, de prolonger le moment de la découverte.

En cette journée du vendredi 27 avril 2018, les élèves de Curemonte sont invités à constituer eux-mêmes 5 équipes de 4 personnes. Chaque groupe représentera un oiseau, ou plutôt une séquence du chant de cet oiseau. On oublie la rangée de gauche des CE2, l’îlot central des CM1 et le coin fenêtre des CM2 pour transformer la salle de classe en une sorte d’arbre gigantesque qui accueille le Chardonneret élégant, l’Accenteur mouchet, le Merle noir, le Rouge-Gorge familier et le Pinson des arbres. Les séquences du chant de ces derniers sont divisées en 4 fragments chacune, déterminés par les ruptures mélodiques et rythmiques que proposent les chanteurs à plumes. Chaque élève se voit alors responsable d’une partie sonore unique. Nous écoutons les 20 motifs composant les 5 séquences de chant et prenons le temps de profiter de leur singularité, de leur clarté. Ce sont l’émerveillement, la curiosité et l’amusement que nous avons ressentis durant cette écoute qui nous ont donné l’énergie de nous mettre au travail, d’entrer dans la réalisation des Partitions ornithologiques.

Dans un premier temps, nous réalisons des fonds. Les enfants sont invités à écouter attentivement le fragment de chant dont ils sont responsables (2 secondes environ) et simultanément l’effet que celui-ci provoque en eux. En ayant observé minutieusement les mouvements intérieurs de cet effet, ils composent d’abord par des mélanges de peinture la couleur qu’ils estiment se rapprocher le plus de leur ressenti. Puis ils choisissent le geste et l’outil avec lesquels ils souhaitent recouvrir de cette couleur une feuille blanche cartonnée (d’un format variable selon la durée de leur fragment).

Réalisation des fonds colorés

Dans un second temps, nous entrons dans la figure. Les élèves disposent de 2 nouvelles feuilles dont le format est identique à la feuille qu’ils ont recouverte de leur couleur : le spectrogramme simplifié du fragment de chant dont ils sont responsables (représentation graphique des hauteurs et de l’intensité du son en fonction du temps) et une feuille de papier calque vierge. Ils sont invités, en prenant pour modèle le spectrogramme de leur fragment, à tracer par effet de transparence avec le plus de précision possible les contours mélodiques de ce même fragment. Ils utilisent pour cela une craie grasse de la couleur de leur choix, en ayant toutefois le souci qu’elle contraste avec la couleur de fond composée. C’est par le geste de leur main qui dessine que les enfants se concentrent et ressentent chaque tenue, répétition, claquement et inflexion du chant de l’oiseau.

Dessin par transparence des contours mélodiques des fragments de chants d'oiseaux

La fin de la journée approche, le temps est venu de collecter l’ensemble et connecter le tout : 20 fonds monochromes, 20 dessins de craie grasse sur calque. Nous nous apprêtons à réaliser nos 5 larges bandes horizontales colorées, une par équipe (Chardonneret, Accenteur, Merle, Pinson, Rouge gorge), chacune logiquement constituée de 4 blocs juxtaposés en fonction de la position du fragment au sein de la séquence du chant. Au moment d’unir ces blocs de couleurs/gestes, quels rythmes ressentirons-nous ? Dans cet univers-là, ce sera peut-être à Paul Klee de devenir notre guide…

Puis ce sera au tour des motifs de craie grasse de rejoindre leurs blocs de peinture respectifs : nous superposerons la figure et le fond, nous unirons les contours mélodiques d’un chant à l’expression d’un ressenti à l’écoute de celui-ci, comme si l’on s’accordait un instant le pouvoir de vivre simultanément une impulsion et sa résonance. Enfin… prendre un peu de recul, se poser, observer, contempler en silence à travers la couleur l’incontestable justesse de la musique des oiseaux.