Le Vieux Monsieur, au Logicien : « C’est très beau la logique. » Le Logicien, au Vieux Monsieur : A condition de ne pas en abuser. (Extrait de « Rhinocéros », Eugène Ionesco) « Sans nouvelles de Gurb » est la grande aventure de deux extraterrestres en mission sur Terre pour y étudier l’être humain. Une histoire pleine d’imprévus, d’humour et de maladresses mais aussi critique sur les mœurs de la société actuelle. Nous travaillerons aussi sur le sophisme et le syllogisme, ces raisonnements usant de la logique à bon escient pour conduire à une absurdité (exemple : « tout ce qui est rare est cher. Un cheval bon marché est rare. Donc un cheval bon marché est cher »). Dans la lignée du travail artistique du collectif INcendio, la création sera poétique, surréaliste, dynamique et pluridisciplinaire (danse, théâtre, musique).
Deux extraterrestres viennent sur Terre pour étudier l’être humain. Gurb part en premier, laissant son chef dans le vaisseau. Après avoir étudié le CATIFA (le Catalogue Astral Terrestre Indicatif des Formes Assimilables) pour passer inaperçu sur cette planète, il choisit de s’incarner en… Madonna. Le ton est donné : allant de maladresses en maladresses, l’exploration de la Terre s’avère être plus compliquée que prévu. Evènements cocasses et imprévus seront au rendez-vous. Moins d’une heure plus tard, le chef est sans nouvelles de Gurb. Il décide alors à son tour de descendre du vaisseau et de s’aventurer sur Terre. Il tiendra son journal de bord assidûment (et c’est ce que nous lisons) jusqu’à la fin de son aventure. A l’instar de Montesquieu et ses Lettres Persanes, Eduardo Mendoza passe par un regard étranger (les extraterrestres) pour proposer une analyse critique de notre société. Avec une écriture humoristique et percutante, la narrateur-extraterrestre nous fait part de ses découvertes et de ses questionnements : " 8 h 05 : J’essaie de rentrer chez moi en traînant des pieds. Ou l’expression (courante) ne correspond pas à la réalité, ou alors il existe une méthode que je ne connais pas pour traîner des deux pieds en même temps… " Je m’appuierai sur le regard étranger et naïf du protagoniste. Il a une perception brute des choses, qui induisent des réactions gauches et illogiques. Je travaillerai sur l’absurde à partir de sophismes et de syllogismes : Sophisme : n.m. Argument qui, partant de prémisses vraies, ou jugées telles, aboutit à une conclusion absurde et difficile à réfuter. Raisonnement vicié à la base reposant sur un jeu de mots, un argument séduisant mais faux, destiné à induire l'interlocuteur en erreur Exemple : S’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème. Syllogisme : n.m. Raisonnement qui a la forme d'une implication dont l'antécédent est la onjonction de deux propositions appelées prémisses. Exemple : Shakira n’est pas enceinte, je ne suis pas enceinte donc je suis Shakira. (définitions du Larousse) Ce type de logique, qui peut s’avérer comique, critique ou poétique, est très présent chez les enfants. Les enfants m’ont toujours inspiré grâce à leur spontanéité et à leur réflexion sur le monde, à partir d’une « vision à trou ». Ainsi, pour moi, être baignée dans un lieu investi par les enfants au quotidien pour travailler est une source d’inspiration. Toujours dans la ligne artistique d’INcendio, je souhaite jouer avec les « ascenseurs émotionnels », le « tragi-comique ». Par exemple, cette scène : "20 h. 00 J'ai tant marché que mes chaussures fument. J'ai perdu un talon, ce qui me force à un déhanchement aussi ridicule que fatigant. J'enlève mes chaussures, j'entre dans un magasin et, avec l'argent qu'il me reste du restaurant, j'achète une paire de chaussures neuves moins pratiques que les précédentes, mais fabriquées dans un matériau très résistant. Equipé de ces nouvelles chaussures appelées skis, j'entreprends de parcourir le quartier de Pedralbes." De premier abord totalement loufoque et comique, elle peut s’avérer tragique. Imaginez un personnage boitant douloureusement, qui s’achète des chaussures solides (qui s’avèrent être des chaussures de ski) en pensant sincèrement que c’est la solution. Il est désespéré, coincé dans ses chaussures de ski, et a probablement beaucoup trop chaud avec. Il veut avancer mais ne peut pas, il est seul. La scène peut encore être totalement absurde : un numéro de claquettes avec un talon en moins, ou encore tenter un numéro de claquettes avec les pieds alourdis par les chaussures de skis. En prenant les choses littéralement, nous pouvons trouver des contraintes sources de création (dans le premier exemple : que se passe-t’ il si je dois créer une danse en traînant littéralement des pieds, comme essaie de le faire l’extraterrestre ?) Le livre est court (190 pages) mais l’histoire est dense et riche en événements. Il va falloir procéder à un choix (arbitraire) de découpage et d’ellipse. Dans un premier temps, je fonctionnerai donc par épisode. En amont de cette résidence je ferai un travail de découpage où je sélectionnerai les premiers extraits sur lesquels je souhaite travailler. Je ne chercherai pas à être chronologique : je préfère fonctionner par moments forts. Les épisodes suivants découleront de ce qui a été créé, en répondant aux besoins de narration et de rythme du spectacle qui s’écrit. Le travail d’assemblage du puzzle (et d’écritures des transitions) viendra dans un second temps. Pour chaque court extrait du livre, nous chercherons plusieurs façons de le mettre en scène. De façon très littérale, comique, lyrique, suggérée, jouée, dansée, musicale… Nous chercherons à explorer toutes les facettes d’une scène. Comme si l’extrait choisi était une boule de pâte à modeler, et que nous cherchions à lui donner le plus de formes différentes possible. Je travaillerai aussi sur la couleur. Très influencée par le dessin et la peinture, la couleur est un élément qui induit une réelle ambiance et qui rythme l'image. Un "tableau" (le terme tableau est à prendre au sens large. Un tableau pictural bien sûr, mais aussi un tableau vivant, au sens d'une scène de théâtre -dansée, musicale, etc.) monochrome propose une atmosphère, et si j'y ajoute des éléments colorés tranchés (par exemple un extincteur rouge sur un mur vert), j'attire le regard du spectateur sur ce détail. Ainsi, l'image est "pondérée" et un extincteur au fond dans le coin peut être mis "au premier plan". Dénaturer les couleurs, les accentuer, les uniformiser... Il y a beaucoup de choses à envisager sur le travail de la couleur d'une scène, avant même d'avoir affaire à la création lumière. (voir la planche d'intention téléchargée sur Visuel 1). Ce texte, à la première personne, pourrait s’apparenter à un monologue. Mais je ne souhaite pas produire un seul en scène. La première raison est que j’aime le travail en collectif. Je pense que la rencontre entre plusieurs univers au service d’une histoire est une force créatrice puissante. La deuxième raison est que le personnage principal dont nous suivons l’histoire est un personnage qui fuit la solitude. J’imagine donc des personnages imaginaires que le personnage principal s’invente pour avoir l’impression qu’il n’est jamais seul. Ils gravitent autour de lui tout le long de l’aventure et le guident dans ses choix, comme ces petites voix dans nos têtes qui pèsent le pour et le contre. L’identité du collectif INcendio est axée sur la pluridisciplinarité. C’est donc naturellement que cette mise en scène suivra cette direction. Pour moi, la danse, la musique et le théâtre sont 3 expressions complémentaires qui s’enrichissent les unes les autres. Une image parle autant que des mots, une musique ou un corps dansant peuvent transmettre une sensation, et le théâtre permet de concrétiser l’histoire. Je collaborerai pour ce projet avec différents artistes interprètes que je connais bien, musiciens, danseurs, comédiens, etc.
Ain
Par le(s) artiste(s)