Avec CONTRE-TEMPS, la compagnie SID explore la notion de durée. Le temps est une notion objective, un outil de mesure. La durée est ce qui est perçu subjectivement par l’individu. Ainsi en fonction de notre âge, de notre sexe, de nos émotions ou de nos expériences, nous appréhendons différemment la durée, expérimentation sensible du temps. Mais comment transposer les variations de durée en fonction de nos émotions face à notre discipline (la voltige aérienne)? Celle-ci nous rend tributaire d'un rythme, d'un temps. Comment dérégler le temps d'un ballant, d'un geste, en fonction de notre état émotionnel ? Nous souhaitons explorer et donner à voir notre propre perception du temps, en tant qu'interprète, lorsque nous sommes face ou avec le public, sur ou dessous notre cadre aérien. Nous irons puiser également dans d'autres disciplines et d'autres techniques (jeu d'acteur, cascade, bruitage, danse, magie nouvelle) pour métisser notre pratique et la mettre au mieux au service du propos.
Dans CONTRE-TEMPS, à l'aide de notre petit cadre aérien, nous questionnons notre perception du temps et de la durée en fonction de l'âge, du sexe, de nos émotions et de nos expériences. C'est un thème qui touche tout le monde et tous les domaines : la philosophie, l'art, la science, le quotidien, l’intime…
Nous souhaitons montrer, partager notre propre perception du temps sur scène, mais aussi nourrir l’écriture et l’interprétation scénique de tout les témoignages que nous pourrons récoltés. Car la façon dont nous avons de vivre les évènements est inégale chez l'être humain. C’est pourquoi nous souhaitons des temps d’échanges et de recherche pour aller interroger, questionner, des personnes en situation sensible : des prisonniers, des personnes atteintes de maladies mentales, des enfants… des profils qui pourraient avoir des perceptions du temps différentes des nôtres aujourd’hui. Dans l’enfance, un drame est vite arrivé et une immense joie peut éclater à tout moment. Pour un prisonnier, y a-t-il des moments qui passe rapidement ? Qu’est-ce qui déclenche le détraquement de la durée dans ces cas présent ?
Pour la plupart des gens, que ce soit quotidien ou extraordinaire, ces variations de durée, peuvent-être à la source de véritable stress ou de conflit quotidien. Aussi, l’idée d’un temps linéaire, qui s’écoule, peut être une source d’angoisse, puisque qu’il nous rapproche petit à petit de notre mort. Considérer que le temps n’est pas forcément linéaire apaiserait-il les occidentaux? En Asie, le temps est vu de manière beaucoup plus cyclique et la mort est donc moins définitive. Même à l'intérieur de l'Europe nous appréhendons le temps différements, en effet, la conception du temps peut varier en fonction de la langue; Les espagnols le voit comme une quantité, alors que les anglais ou les danois comme une ligne continue, une distance. Les bilingues quand à eux peuvent avoir des manières bien distinctes de l'entre-voir en fonction du contexte ou de la langue employer.
Ce processus physique, est également un mécanisme de survie. lorsqu’un être humain est effrayé, le temps paraît s'étirer, parfois même s'arrêter. ce qui va lui permettre de réagir au danger.
A l'inverse, dans un moment de plaisir intense, il semble passer à toute vitesse. De même qu'en vieillissant la perception du temps semble aller en s'accélérant, il semble que cette représentation n'est pas la même si l'on est un homme ou une femme du fait d'une chronobiologie différente (ménopause-andropause) et d'une pression sociale plus ou moins forte (il faut être désirable, il faut être mère). Pour un enfants les années paraissent plus longues et nous vivons plus intensément chaque moment de notre jeune vie.
Nous nous sommes également intéressés à d'autres domaines d'expérimentation de la durée :
- le flash-back : la sensation de "retour en arrière ", de durée remémorée, anachronique
- le black-out : phénomène d'ellipse temporelle, de durée suspendue, observée à l'occasion de chocs post-traumatiques
Nous nous appuyons sur ces réflexions pour chercher à étirer, arrêter, accélérer, découper, décomposer, pour enfin recomposer le temps sur scène.
Le "petit cadre" sera notre support principal pour explorer ce propos. Le petit cadre est une adaptation du cadre aérien (5m) à basse hauteur (3m) que nous avons découverte et expérimentée lors de notre première création : L'IRONIE D'UN SAUT. La tête est près du sol et sans tapis, cette variation du cadre aérien nous permet de rester proche du public et de garder un rapport au sol fort, tout en restant une discipline aérienne. Le risque est inversé, mais pas diminué : il n'y a plus de tapis et on doit esquiver le sol, ce qui nous a rapidement conduit à développer des cascades spécifiques et adaptées à notre discipline et notre agrès. Construite en partenariat avec la compagnie Transe-Express , notre structure de petit cadre aérien sera à la fois décors et agrès, conçue pour traiter de la temporalité de par sa hauteur, mais aussi par certains trucages et mécanismes. Pour les mécanismes qu'ils soient inclus ou non dans la structure nous souhaitons être accompagnés ou tout du moins conseillés, par un spécialiste de la magie nouvelle.
Qui dit magie nouvelle, dit aussi création lumière, car elle est un partenaire indispensable aux installations et trucages. Mais la lumière en elle-même, est un média nécessaire à la transmission du propos. Car elle offre un large champs de possible quand au décalage de l'image, épaisseur, texture et même de rythme. Elle devient un outils chorégraphique nécessaire à CONTRE-TEMPS et permet de définir une esthétique propre à cette pièce, à la scénographie très épurée. C'est Clément Devys, créateur lumière de L'IRONIE D'UN SAUT, qui nous accompagnera à la lumière.
Le compositeur et sonorisateur Charles Dubois proposera une création musicale inédite, qui viendra appuyer les dérèglements temporels du duo. Nous souhaitons que cette création sonore soit le pilier de cette forme. C’est elle qui donne le rythme et qui sera le contre-point des décalages rythmiques.
Nous souhaitons également étoffer nos qualités corporelles en travaillant sur les possibilités qu'offre la danse hip-hop dont la gestuelle repose sur la décomposition et l'altération du rythme et du temps. Nous sollicitons Bouzid Ait Amane, danseur chorégraphe et également interprète notamment de la compagnie Mourad Merzouki.
A ce jour, à l'aide des différents outils que nous venons de citer, nous envisageons le spectacle en trois actes:
Acte public : Nous aimerions proposer au spectateur une version “juste” rythmiquement de la forme. C’est-à- dire sans accroc, une maîtrise totale et rythmée de la chorégraphie aérienne, où chaque émotion visible est contrôlée par l’artiste. Ici, seul ce qui doit être vu peut l’être.
Acte voltigeuse : C’est le même spectacle, en apparence, que nous recommençons. Mais comment le temps se dérègle, lorsque de vraies émotions se dégagent de l’acrobate ? Peur, plaisir, plaisir, peur tout s’enchaine, s’étire et s’alterne, jusqu’au temps lui-même, donnant ainsi à une même structure une forme différente du premier acte.
Acte porteur : Pour la dernière portée musicale et physique, c’est le porteur qui sera moteur des dérèglements temporels. Ces émotions le trahissent, la chute de l’autre, comme un flash back...
Du premier au dernier acte, une distorsion de notre perception, si différente de la réalité.
Ce sera Michel Cerda, que nous avons rencontré à l'occasion de notre formation à l'Académie Fratellini et qui était déjà présent pour L'IRONIE D'UN SAUT, qui nous accompagnera au jeu et à la dramaturgie .
Par le(s) artiste(s)