Maripasoula explorations 1

Maripasoula explorations 1

Publié par Romain Baujard

Journal du projet

Alors que je suis rentré depuis deux mois, un film a commencé à se former dans ma tête. Un genre de portrait de la ville, au fil du temps. Les temps de repérages et de photographies ont donné lieu à ce récit. 

J'ai décidé de partager ce scénario hypothétique, d'une journée à Maripasoula...

1. EXT JOUR. Rues de Maripasoula

C’est  le matin à Maripasoula. Les rues sont encore vides, le soleil est déjà bien présent.

Il est 6h30 du matin.

L’activité commence à peine, les rotofils sont mis en marche.

On entend quelques coqs au loin. Les trous des routes sont encore inondés de la pluie de la nuit. Des hommes sortent torse nu, et promènent leur picolette dans de petites cages qu’ils tiennent à la main.

Une pirogue arrive de Papaichton et décharge une famille, et d’autres partent pour saint Laurent du Maroni dans des pirogues de fret, débordant de tonneaux remplis de kérosène.

2. INT. JOUR. Bureau du directeur de l’école Alexis Jonas

Dans le bureau de Paul Beausoleil, c’est le matin. Il est directeur de l’école, et dans cet espace loin de la récréation, un grand bureau et des bancs. Que se passe-t-il ici ?

On observe le directeur régler de la paperasse, passer des coups de fil. Il semble organiser les départs pour le collège après le CM2.

Les enfants se rassemblent au loin dans la cour, on les entend.

On assiste ensuite à un défilé d’élèves qui viennent se plaindre du comportement des autres…

Chacun y va de son commentaire. Le directeur leur demande à chaque fois pourquoi on les a envoyé ici. Où; si quelqu’un se plaint de l’un de ses camarades il dit "va me le chercher ! "

Un drôle d’équilibre est progressivement mis en scène. Les élèves se succèdent, et à chaque fois, réagissent différement. Certains ont la tête baissée, penauds. D’autres sont fiers, adoptent une attitude indolente, ou à la limite de l’insolence. Certains pleurent, visiblement honteux de se retrouver dans le bureau. On sent que certains sont des habitués.

"La maîtresse m’a envoyé pour telle ou telle raison… etc. "

Ils s’assoient ou restent debout dans un coin de la pièce où le directeur les oblige à se tenir.

"Qu’est ce que tu as fait petit garçon ?"

Certains ont insulté leur camarade, " Pierre a dit que L… couchait pour 10 euros "…

D’autres se sont battus dans la cour, avec des ciseaux, une rivalité entre la classe Ulysse et la classe de CM1…

D’autres arrivent en hurlant en Bushinenge mais le directeur les force à lui parler français.

On se demande alors plusieurs choses, en se mettant à leur place, et en se remémorant nos jeunes années : comment aurais-je réagi ? Est-ce vraiment si grave que ça ? Celui-ci a l’ai d’ête accusé à tort. J’ai de l’affection pour untel, celui la finira mal…

Dehors, par la fenêtre, on entend l’un des professeur hurler sur les enfants. Il promet une grande punition à l’un d’eux…

Pendant la récréation, les enfants courent dans tous les sens, certains, notamment les filles, se prennent les unes sous les bras des autres.

Elles marchent comme cela, se soutenant. Certains courent, se chamaillent, la plupart des élèves sont noirs, saufs quelques rares têtes blondes.

De retour dans le bureau, les professeurs passent, et parlent à Paul Beausoleil des problèmes de remplacements, des absences, du manque de matériel. L’ambiance est à la plaisanterie, et Paul répond très franchement.

Une vieille femme à l’entrée coud. Réalise des panguis.

Le temps passe.

Cela fait deux semaines que le directeur appelle, impassible et sourire mi amusé, mi résigné, la société qui s’occupe d’internet : y’a pas de réseau depuis deux semaines…

Certains des enfants sont obligés d’aller ramasser des papiers dehors, dans la cour.

Il y en a que ça fâche, d’autres que ça excite, ravis de pouvoir rater quelques cours et rester en récréation.

Une mère de famille vient demander des conseils concernant les inscriptions pour le collège pour son fils.

3. EXT JOUR, rues de Maripasoula

Dans la terre rouge, les gens marchent, tranquillement. Chacun se fait un pouce en passant.

On est sur la place de la ville, et il y a Thomas, le prof de sport avec ses élèves du college, qui vont faire une activité.

Un quad passe…

C’est Charlotte, qui travaille au parc amazonien de Guyane.

Elle revient de quelques jours en pays amérindien. Elle raconte à une amie croisée là.

"les bushis parlaient fort dans le village, ils remplissaient l’espace sonore des amérindiens.

Difficile de s’entendre dans ce projet Lobi… qui est censé rapprocher les différentes communautés …"

3. EXT JOUR Le Terminus Maripasoula

Le contraste est saisissant avec ce lieu ombragé et arboré : un petit chemin en béton, des lampes au sol, le lieu surplombe le fleuve, et semble paradisiaque. Des bungalow individuels, une grande maison où vivent les propriétaires avec une piscine sur le devant.

Candido, sexagénaire un peu bedonnant et édenté, raide comme quelqu’un qui a subi une opération à la hanche,

large sourire, passe le rotofil, sur toute la propriété (carbets, bungalows…) Il ratisse bien.

Il porte un tablier, tâché comme un boucher et un casquette Maripasoula, 83.

Candido, en voix off, parle du terminus avant :

"y’avait les orpailleurs,… je suis arrivé en 83. Du Brésil Ouh…On a tout défriché . Maintenant faut tout aller acheter en face, pour fabriquer une maison en dur, pas en bois c ‘est dévoré par les fourmis et les termites "(il sourit).

Il renverse de l’essence dans son rotofil pour continuer le travail.

Aussi, il en verse dans un petit amas de terre grise, et les fourmis rouges en sortent soudain ultra rapides jusqu’à en mourir.

Pas loin, on découvre Maria, large lunettes sur un visage surmonté de cheveux bouclés, un grand ventre. Elle vide un des bungalows, les poubelles. Elle fredonne, passe le balais à l’intérieur. Elle fouille une poubelle pour récupérer des choses. Elle est pieds nus. Elle a peut être 55 ans… très discrète et efficace dans ses gestes. Candido s’arrête et l’observe faire le ménage. Il lui fait une plaisanterie qui a l’air un peu grasse (en portugais) elle rit.

On voit plus loin des touristes, en Quechua, avec du matériel, bien équipés pour le camping et les randonnées. On sent le contraste entre ces gens qui viennent se ressourcer, ‘"l’aventure" et les employés qui ratissent et nettoient le terminus sous le soleil. Les uns mettent leur hamac, d’autres lisent assis sur les bancs. Ils attendent une pirogue pour aller en pays amérindien…

On croise … une haïtienne, avec sur la tête, des cacahuètes. Elle passe au seuil des bungalows pour vendre, en parlant fort. "doudou ! ".

Elle est habillée très colorée. Elle parle un créole que la plupart des gens ne comprennent pas mais font semblant de comprendre.

On lui achète quelques paquets.

Deux piroguiers qui attendent un groupe de touristes lui demande si elle est mariée. Elle répond qu’elle vend les cacahuètes pour payer ses habits et le loyer. L’un des deux lui dit qu’il faut pas qu’elle reste seule, que la femme est comme le crabe au milieu d’un jardin…

Elle repart dans la ville, passant devant les maisons et essayant de vendre ses cacahuètes qu’elle porte sur la tête.

...

4.INT. JOUR office du tourisme

Stan, d’origine amérindienne, renseigne les clients sur les excursions en forêt, ou en vit à travers les pistes. Il parle de comment aller jusque Papaichton, New Wacapou, aux cascades de Gobaya Soula. Son père, Etoo, entre dans l’office. Il est avec un jeune enfant et sa femme. Ils échangent en Wayana.

Une jeune fille bushi loue des vélos dans l’arrière boutique.

On y vend des souvenirs, des t-shirts de la ville, des ciels de case peintes pas Mines Adanouman.

5.INT. JOUR Le café de Maryse

Au café restaurant de Maryse, créole, les gens se rencontrent pour manger et discuter;

On y rencontre des employés du parc, une brésilienne et un type assis au fond, occupé à chasser les mouches.

Parfois à la télé il y a des matchs de basket ou de football et le fils de Maryse fait des allers retours avec les plats. On prend les commandes par téléphone.

6.EXT JOUR dégrad

Au dégrad, les pirogues passent pour aller de l’autre côté du fleuve, au Surinam, dans les épiceries chinoises.

Papa john reçoit sur sa pirogue une famille de brésiliens, qui habitent du côté français, mais qui font leurs courses dans l’épicerie Yamaha en face. En rentrant sur la pirogue, les gamins minuscules dans les gilets de sauvetage trop grands, le prennent dans les bras, ce gigantesque noir aux lunettes bleues, tout sourire.

La traversée se fait, et soudain la pluie tombe en trombe d’eaux.

Les brésiliens rentrent jusque chez eux en moto, ils vivent au milieu de la forêt Dans une maison, au déca des limites de la ville dans quartier Sophie.

En arrivant, on voit Sylvain, piroguier, qui attend une cliente pour retourner dans l’après midi à Papaichton, dans sa gigantesque pirogue rouge qu’il a hérité de son grand père. Il travaille avec un autre gars, foulard sur la tête. Ils attendent à l’ombre et à l’abri maintenant des arbustes proche du dégrad, en grignotant, dans les herbes.

Des gens déchargent des paquets de boissons, des nouilles et des coups lyophilisées.

7.INT / JOUR école Jonas

Frank, un enseignant est assis devant des élèves de l’école Jonas. Il raconte un MATO, conte Aluku qui met en scène les pérégrinations d’un personnage qui traverse la forêt. Cela chante et danse dans la classe. Frank parle Maluku et français, il passe d’une langue à l’autre. Les enfants assis sur les chaises s’avachissent, dansent, se lèvent… Il sont très heureux et très agités.

Vues de Maripa...