Affiche

En écriture... Super Radio méga Minus

Publié par Barbara Atlan

Théâtre Radio

Journal de Bord (suite)

Entre les enregistrements, les discussions, les « Super Héros » et les improvisations qui ont été faites, nous considérons que nous avons assez de matière pour écrire le spectacle.

Le vendredi soir, le bus parti et l’école vide, nous écrivons à deux ce spectacle. Après des dizaines de tisanes et des ballades dans l’école de nuit, des petits tests sons et lumières, des débats exaltés et des écritures de scènes, ainsi que d’un long monologue sur la liberté, le risque et l’enfance, nous avons écrit notre spectacle.

Ecriture du spectacle et création :

Nous voulons que l’espace de l’école soit transfiguré, que les enfants aient une nouvelle vision du lieu qu’ils fréquentent quotidiennement. Nous nous sommes inspirées du film « Good Morning England »

Le spectacle, se jouera à 20h30, à la tombée de la nuit, dans un premier temps, le public sera au milieu de la cour de récréation. Les enfants entreront par effraction dans l’école, pour animer « super radio méga minus » (titre trouvé par les CM2), une radio pirate diffusée la nuit, uniquement pour les enfants. De la cour, les spectateurs observent la vie dans le studio de radio (dans une salle de classe), le démarrage de l’émission. Puis un à un, de nouveaux espaces s’allument, on voit des enfants écouter « Super radio méga minus », dans un dortoir sous des draps blancs, cachés à cinq dans les toilettes extérieures de l’école, dans un cabanon en train de manger des chamallows et de jouer aux cartes, dans une salle de bain, etc.
L’émission nocturne se déroule sans encombre, on y parle de l’amour, des bêtises, de la fin du monde, on fait des Quizzs. On entend des montages (de 4 minutes maximum) des interviews d’enfants sur des sujets comme les bêtises, l’amour, la fin du monde, parfois des appels sont passés des chambres ou des toilettes. De la musique est diffusée et tout le monde danse, dans son espace. Il y a en permanence de la vie dans tous les espaces, quelques petites scénettes, des 
enfants qui écoutent la radio viennent rythmer l’émission.

Puis la radio Pirate commence à dysfonctionner, elle se brouille puis on entend la voix d’un adulte :

 « Nous vous avons démasqués, ce que vous faites n'est pas autorisé, à cette heure les enfants dorment et n'écoutent pas la radio, qui vous a donné la permission ? Les radios pirates sont interdites, nous allons intervenir »

A partir de ce moment, une chroniqueuse appelle les enfants à venir manifester, tous les enfants sortent dans la cour, et en musique, entraînent le public dans une grande salle.

Une manifestation chorégraphiée se met très rapidement en place. Armés de banderoles et de leurs dessins, les enfants luttent pour leur liberté d’expression. Ils se transforment au fur et à mesure en Super Héros, d’une danse naît le monologue final qui ramène chaque adulte à ses sensations enfantines.

 

 

On cherche, on travaille, on se transforme, on enregistre!

MANIFESTATION A PARIS

CONSTRUCTION DE LA 2EME PARTIE DU SPECTACLE

LA MANIFESTATION

Les slogans

Durant une journée, nous n’avons pas accès à la grande salle, nous décidons donc de faire un travail à la table avec les élèves. Ils doivent proposer des noms de radio puis voter. Puis ils doivent chacun chercher leurs slogans, pour cela nous leurs demandons ce qu’ils aimeraient le plus faire dans leur vie, même si c’est impossible. Nous débattons plus précisément sur la notion du risque, en leur expliquant comment nous envisageons le risque toutes les deux. Tous les slogans démarrent par « Au risque de... », ainsi nous obtenons des « Au risque d’être un Jedi », « au risque d’être un chercheur de trésor », « au risque de m’envoler sur ma moto », « au risque de battre le record du monde de marathon »….
On apprend à respirer par le ventre pour projeter la voix sans la casser. Pour parler très fort et non pas crier. Ils clament tour à tour leurs « Au risque », comme ça commence à prendre forme, on va plus loin, on dit les « Au risque » en chœur puis un par un ils disent leur phrase, on varie les rythmes.

Le tableau

Avec l’exercice du tableau qui avait déjà été traversé durant la première résidence sur le thème de la plage, des sports d’Hiver, nous construisons une image stylisée de manifestation.

De nombreuses images de manifestations ainsi que des œuvres picturales comme « le radeau de la méduse » sont présentés aux élèves pour qu’ils puissent s’en inspirer.

Un a un, les enfants viennent s’installer dans une position figée sur le plateau jusqu’à créer une photographie. Les expressions du visage et les corps doivent être très expressifs.

Pour certains enfants, c’est un vrai travail de rester immobile, nous passons un peu de temps pour essayer de comprendre ce qui nous pousse sans cesse à gigoter. Nous nous concentrons sur la respiration qui tranquillise peu à peu le corps.

Puis l’image s’anime, des slogans sont criés, un chant est inventé. D’abord c’est un enfant qui commence, puis les autres répètent en chœur. Nous varions les vitesses, ainsi la manifestation passe parfois au ralenti, comme un film en version accélérée, ralentie ou même en pause.

 

La transformation en Super-Héros

Au cours de nombreux échauffements, nous avions essayé d’être ensemble, de suivre le mouvement d’une personne sans que le public s’en rende compte. Leur goût pour la musique et la danse nous a étonnées, ainsi nous avons décidé que la deuxième partie du spectacle serait assez chorégraphiée.

 Les démarches de supers Héros vont aussi nous aider à inventer ensemble une danse de « transformation ».

Alors on crée ensemble une danse, en imaginant des gestes précis de transformation. Chaque mouvement veut dire quelque chose, fait partie de notre imaginaire commun. D’abord les jambes tremblent, on se regarde, on a peur, on se demande ce qui se passe puis on devient très puissant, on se tourne vers le public en lui envoyant une boule de feu...etc

Le résultat de cette danse surpasse nos ambitions. Chaque élève est investi, l’effet de groupe est impressionnant et ils retiennent les mouvements à une vitesse folle.

Le dernier jour, on lie tout ce qu’on a fait, ainsi la dernière partie du spectacle est mise en scène, il ne manque plus que le monologue final, qu’on incorporera à la fin de la chorégraphie, c’est-à-dire le moment ou les enfants reforment le tableau de la manifestation mais finissent par s’endormirent les uns sur les autres.

Cette partie les fait beaucoup rire, c’est un tas de corps qui ronflent. On ne sait plus à quoi on a assisté. N’était-ce pas simplement un rêve d’enfant ?

MANIFESTATION / REVOLUTION

Lecture du texte et « devoirs » pour la suite

Depuis quelques jours déjà, les enfants trépignent d’impatience, ils nous posent des questions sur le spectacle car ils ont envie de le découvrir dans son ensemble.
Nous avons essayé de faire la distribution du texte la plus équitable.
On lit le texte ensemble, chacun à l’air convaincu de sa partition et enthousiaste.
Leur mission à présent est d’apprendre le texte en notre absence, de confectionner de belles affiches et banderoles, de continuer leurs dessins de Super-Héros s’ils ne sont pas finis et surtout d’apprendre le texte et la chanson.

Mais comment apprend-t ’on un texte de théâtre ? Il faut connaître sa réplique mais aussi les deux répliques qui précèdent pour ne pas être perdu.

Nous partons, plus que satisfaites de ces deux semaines, nous avons avancé plus rapidement que nous le voulions et surtout nous avons créé un véritable lien avec les élèves. On s’apporte mutuellement énormément de joie et d’envie de créer.

Marie-Pierre, l’institutrice, nous promet de faire beaucoup d’italiennes en notre absence.
Quelques semaines plus tard, elle nous envoie une vidéo pour que l’on voit l’avancée des travaux et nous raconte que l’apprentissage s’est fait très vite vue leur motivation.

"Tu te souviens de la première fois que tu as enfoncé tes pied dans le sable chaud ? "

EN LIBERTE! (Extrait du spectacle de Barbara Atlan et Lison Rault)

Tu te souviens de la première fois que tu as enfoncé tes pied dans le sable chaud ? Chaque grain venant se nicher dans les replis de tes orteils, et la tempête qui se soulève, les vagues qui s’agitent, le vent qui souffle fort. Tu te souviens, ta première bataille de boules de neige et ta première chute en ski, quand tu as roulé sans t’arrêter jusqu’en bas de la piste ? Tu te souviens le soulèvement de ton cœur quand l’avion a décollé pour la première fois et la main rassurante de ta mère qui ne t’a pas lâché ? Tu te souviens des secrets que vous vous disiez entre vous, un peu pour qu’ils soient répétés, et ceux confiés comme un trésor ? Tu te souviens des parties de monopoly interminables, des jeux sous la pluie qui te mouillait jusqu’aux os, de la boue sous tes chaussures et de tes mains remplies de peintures, tu te souviens des gâteaux tout chauds que tu mangeais à t’en brûler la langue, et les 10 bougies que tu as réussi à souffler d’un seul coup ?  Tu te souviens avoir pleuré quand on t’a dit que mamie était partie et tu te souviens de la chaleur de tous ces câlins échangés qui t’ont apaisé le cœur ? Tu te souviens la première fois que tu lui as pris la main et que tu ne pouvais plus la lâcher ? Tu te souviens les longues discussions avec Alban ton ami imaginaire ? Le jour où tu as enfilé ton costume de spider man 17 jours d’affilée, où tu as gagné les billes de toute la cour de récré, le jour où tu as mangé tellement de bonbons que tu as commencé à voir tout bleu ? Tu te souviens du jour où tes bras se sont allongés, tes cheveux se sont transformés en salamandre, des écailles se sont formées sur ton dos, tes mains ont commencé à lancer des boules de feu, des rayons lasers ont traversé tes yeux et un souffle supersonique propulsait tes chaussures à la vitesse de l’éclair.

Vous avez été des enfants héroïques, vous avez goûté le monde, vous avez écouté un bruit jusqu’à ce qu’il se confonde avec la nuit et vous enveloppe comme une voie lactée merveilleuse. Vous avez bercé une feuille d’herbe, un caillou, un mot, des tas de choses impossibles à bercer, vous l’avez fait, vous avez traqué sous vos paupières à demi closes un signe de vie à l’envers, vous avez construit des passages, des signes, des alphabets, vous avez essayé de comprendre et de vous raconter des histoires pour être moins effrayés.

 Toute cette énergie folle dépensée pour rien, pour quelques sensations fugitives et brûlantes restée sous la peau, toutes ces premières fois découvertes ébahis, les yeux écarquillés, subjugués par chaque instant, chaque nouveau moment passé avec le monde.

Nous ne voulons pas que ces yeux là qui nous font voyager, intrépides, aventureux, insoucieusement dans le monde s’en aillent, nous ne voulons pas arrêter de rire trop fort ni passer un temps infini avec nos copains, nous ne voulons pas cesser de rêver d’être pompier puis vétérinaire le lendemain, puis joueur de flûte, envouteur de serpent, puis encore autre chose parce qu’en nous ça déborde de tout un tas de trop d’envies incontrôlables. Nous ne voulons pas être blasés, ennuyés, tristes ou croire que quelque chose n’est pas pour nous. Nous avons envie de croire que nous pouvons gravir des montagnes à la force de nos bras, affronter les tornades, vaincre les dragons cracheurs de feu, et découvrir de nouveaux pays encore inconnus de tous.  Nous avons envie d’imaginer qu’on peut toujours continuer à croire fort fort fort, comme on croit quand on est enfant.  Nous voulons grandir en dévorant le monde sans retenue, avec fougue, audace, impertinence ! Que ça brûle dans nos cœurs et que la joie envahisse nos yeux pour qu’ils ne s’arrêtent jamais de voir ce qui est beau !