Ebauche d'un scénario

Publié par Lawrence Vaigot

Journal du projet

Les enfants proposent leur vision de Gulliver.

Lors des premières séances à l’école de Louin, nous avons présenté notre projet, à la fois ce que nous allons faire de notre côté et à la fois le projet de court-métrage que nous voulons monter en commun avec eux. Nous avons donc parlé du sujet qui relie tout ça, à savoir Gulliver. Certains enfants connaissaient déjà le personnage, ils avaient vu le dernier film sorti sur le sujet. Mais pour eux l’histoire se bornait aux Lilliputiens. Pour les autres enfants, Gulliver n’évoquait rien. Nous avons donc pris le temps de raconter les différentes histoires décrites dans le livre de Swift, en en lisant ensemble des extraits.

Une fois bien mis au courant des différentes aventures de Gulliver, des différents pays traversés par celui-ci et de leurs habitants, il est temps d’interroger les enfants pour connaître ce que ces histoires évoquent pour eux, ce qu’elles font résonner comme images, situations, etc.

Lors d’une séance pendant laquelle les enfants sont répartis en trois groupes, nous proposons donc un atelier table-ronde pour réfléchir à une ébauche de scénario pour le film à réaliser avec eux. Les enfants expriment d’abord leurs idées autour de deux questions : qu’est-ce qu’un lilliputien/géant/laputien/yahou/houyhnhnm pour toi ? A quoi te font-ils penser ?

Rapidement leurs réponses tournent autour du jeu des échelles de taille et autour des caractères très tranchés que décrit Swift dans son livres. Les lilliputiens les font penser aux insectes du tas de compost, à des nains de jardin tandis que les géants seraient les arbres ou les bâtiments. Les laputiens à des scientifiques et les yahous à des singes.

Puis la réflexion s’oriente peu à peu vers des bribes d’histoires. Nous rajoutons comme contrainte qu’il faut qu’elles soient réalisables au sein de l’école avec le matériel disponible. Ce qui est amusant c’est que, sans s’être concertés, de grandes lignes directrices se retrouvent d’un groupe à l’autre, sans doute partagent-ils un imaginaire commun. À chaque fois, les enfants nous racontent qu’un lilliputien pourrait débarquer pendant un cours dans leur salle de classe. Certains nous disent qu’ils en auraient peur, d’autres qu’ils voudraient l’écrabouiller, puis quelqu’un propose un contexte amusant : c’est durant une dictée qu’un élève découvre un lilliputien dans sa trousse et il va s’en servir pour aller subrepticement chercher les réponses sur le bureau de la maîtresse.

Pour les habitants de Laputa, le consensus se fait dans chaque groupe autour de la représentation de ceux-ci en scientifiques. L’histoire aussi tourne à chaque fois autour de l’idée que les laputiens seraient en train de débattre et de rêver de la fin du monde. En revanche, alors que certains bloquent à savoir comment faire comprendre cela aux spectateurs dans un film muet sans dialogues appuyés, d’autres inventent des scènes de rêve où l’on verrait ce qu’imaginent les laputiens. Dans deux groupes différents un enfant propose que des bulles comme de BD apparaissent avec des dessins de météorites, de chronomètre… Faire apparaître des bulles de BD dans un film en prises de vues réelles cela nous interpelle car cela nous rappelle « Qui veut tuer Jessie ? », un film de Vaclav Vorlicek que nous avons vu deux semaines plus tôt et qui nous a beaucoup plu.

Pour les yahous et les houyhnhnms, leurs idées tournent autour de l’opposition entre ces deux espèces. Dans plusieurs groupes on nous propose que les yahous soient joués par les enfants de l’école et les houyhnhnms par les maîtresses. Eux imiteraient des animaux, seraient sauvages et grimaçant tandis que les maîtresses, à moitié affublées en cheval, boiraient le thé et auraient un comportement des plus noble et respectable. L’un d’eux avance une idée qui nous fait sourire : comme dans le livre de Swift les yahous sont les animaux domestiques des houyhnhnms, les maîtresses pourraient promener en laisse certains enfants yahous. L’image est plaisante mais sera-t-elle réalisable ?

Nous rentrons de la séance, armés de toutes leurs idées, qu’elles soient juste des images, des évocations ou qu’elles soient plus nourries comme des débuts de trame. À nous désormais d’en tirer un scénario qu’on leur proposera ensuite.