Histoire à dormir debout est un projet de court métrage d’animation surréaliste ayant comme point de départ le rêve. Véritable cadavre exquis animé et constitué de fragments rêvés, il a pour objectif de libérer la créativité en s’affranchissant des limites physiques de la réalité grâce à la magie du dessin et de l’image par image. Le processus créatif de ce projet de recherche s’articule en plusieurs grandes étapes qui sont chacune l’occasion de mettre en application différentes notions avec les enfants. Je souhaiterais, donner aux enfant l’envie de raconter des histoires à partir de leurs propres rêves et les aider à stimuler leur imagination pour le faire. A partir de leurs journaux de rêves, nous mettrons en place des ateliers d’animation pour petit à petit interpréter et relier tous ces fragments de rêvés. Les mots, les idées, les dessins ou mêmes les émotions, toutes issues de petits bouts de rêves, nous permettront de constituer notre propre collection que nous viendrons ensuite assembler et relier telles les pièces d’un puzzle pour raconter notre « Histoire à dormir debout ».
Par le biais de courtes scènes réalisées par petits groupes d’enfants et en nous appuyant sur leurs rêves, je voudrais réaliser un court métrage qui viendrait matérialiser leur imaginaire nocturne. Telles les pièces d’un puzzle, une séquence en entrainera une autre, et j’interviendrai en composant les transitions animées. L’objectif final du projet étant la création d’un objet filmique reprenant les rêveries d’une classe, avec, je l’espère un carnaval d’histoires et une profusion de mélanges. Un film « pêle-mêle » alimenté par la personnalité et la matière de chacun.
A travers ce projet ma recherche personnelle s'enrichirait des expérimentations et anecdotes des enfants que je souhaite archiver dans un blog. Il tiendrait lieu de carnet de bord du projet dans l'idée d'une recherche pour un prochain film personnel. Mais aussi je souhaite profiter de ce projet pour développer des expérimentations pratiques et théoriques entamées autour de la structure narrative. Au delà de mon intérêt premier pour le sujet du rêve, ma problématique personnelle s'énoncerait ainsi : Comment constituer un tout filmique cohérent à partir d'éléments épars ?
Pour ce faire, il me faudra mettre en place avec les enfants une régularité dans la récolte des éléments rêvés. Cette collecte pourrait être envisagée de différentes manières, j’aimerais proposer aux enfants de tenir un carnet où ils pourraient inscrire notes et dessins de leurs impressions rêvées. Cette démarche je compte l’entamer de mon côté au préalable pour pouvoir leur en offrir quelques exemples probants. Ils seront également incités à raconter leurs rêves à leurs proches pour ne pas les oublier au saut du lit et ainsi tenter d’entrer dans une « routine créative ». Un tel exercice améliore l’écoute de soi et incite les enfants à s’ouvrir au monde, à ne pas laisser s’échapper les petites choses, à les capter. L’idée est également de démystifier la création et de leur apprendre que les projets se font petit à petit. D’un carnet sort une image, une idée, puis deux, puis trois, et le carnet s’épaissit progressivement de bribes récoltées au fur et à mesure. C'est ainsi que j'ai l'habitude de travailler.
S’en suivront des échanges qui consisteront à traduire graphiquement, et de manière plus aboutie, ces notes de carnet. Nous ferons du dessin d’imagination. En leur demandant de fermer leurs yeux, ils pourront tenter de retrouver l’image mentale de leur rêve et essayer de la remettre sur le papier. Un rêve dont l’on se souvient c’est souvent impactant mais difficile à exprimer. Cela produit ce que j’appelle des images « floues » qui s’étiolent au fil du temps si l’on n’essaye pas de les capter le plus vite possible. Je suis très curieuse de voir les images que peuvent produire des enfants de cycle 3 sur le sujet. Que le dessin soit abstrait ou figuratif nous nous demanderons comment par exemple, retranscrire une émotion, une sensation. Cela passe-t-il par une représentation ou une forme ou une couleur ? Cette image créée évoque-t-elle un mouvement spécifique ?
Démarreront alors les prémisses de l’animation : nous apprendrons ensemble à « faire bouger » les images. Par le biais de différents exercices, je m’attacherai à leur faire comprendre qu’il est possible de faire ressentir l’intensité d’une colère ou la profondeur d’un chagrin par des mouvements simples. Faire vibrer un gros carré rouge peut être bien plus expressif que le dessin fixe d’un gros bonhomme crispé de fureur. Si l’on y associe des bruitages c’est encore plus probant ! Je souhaite partager la joie que j’ai ressentie la première fois que j’ai vu mes dessins s’animer et montrer à quel point l’utilisation du mouvement ouvre le champ des possibles artistiques.
Souvent les situations rêvées sont absurdes et leur juxtaposition humoristique. Par le biais de ce projet je souhaite donner envie aux enfants de se raconter et leur montrer à quel points ces petites historiettes rajoutent de la fantaisie dans notre quotidien. Comme je l’ai dit précédemment, je voudrais les inviter à s’ouvrir au monde mais surtout à LEUR monde. Dans une société ou nous sommes en permanence abreuvés de centaines d’images, je veux les aider à développer leurs images leur donner envie d’explorer leur monde intérieur.
Une fois les expérimentations graphiques et animées réalisées. Je voudrais réunir les enfants en différents petits groupes et leur demander de s’accorder sur un court fragment rêvé à animer. Déterminer ce qu’il s’y passe, établir un Story-Board pour planifier l’enchainement des mouvements et organiser la prise de sons. Ce fragment aura-t-il besoin d’un doublage ou de bruitages ? Par ce passage au travail d’équipe je voudrais mettre les enfants à l’écoute les uns des autres et montrer que cela permet de tirer le meilleur de chacun.
C’est ces fragments animés que nous assemblerons pour réaliser le film final. Le cœur de ma recherche, au delà des histoires racontées, c’est surtout la manière dont nous allons les regrouper dans un tout commun. Comment leur donner un ordre ? Lequel ? Montrer au enfants le principe de l’effet Koulechov. Cet effet de montage magique par lequel les spectateurs tirent plus de sens de l'interaction d'un plan avec un autre plan auquel il est associé, que d'un plan isolé. C'est le fameux 1 + 1 = 3. Je voudrais que nous expérimentions l’usage de cet effet dans notre montage et que nous imaginions des transitions animées. Transitions que j’aboutirai et réaliserai moi même. Tout cela dans l’idée de se rapprocher le plus possible de la structure narrative du rêve où lorsque dans une seule nuit l’on enchaine des songes les uns à la suite des autres et que tout cela au réveil nous paraît évident. Par mes expérimentations dans ce travail de montage, d’enchaînement et de transitions je voudrais réussir à donner à ce film une logique interne lui permettant d’exister comme un tout cohérent.
Par le(s) artiste(s)