Le 25 janvier. Le Loiret est sous la neige. Le train de Paris offre à ses rares passagers d’inattendus panoramas. La gâtine n’est plus qu’un mutique dessin dont on aurait effacé la majeure partie des traits.
Le 25 janvier.
Le Loiret est sous la neige. Le train de Paris offre à ses rares passagers d’inattendus panoramas. La gâtine n’est plus qu’un mutique dessin dont on aurait effacé la majeure partie des traits.
Après maints tableaux et gribouillis de flèches, j’avais réussi à réserver un taxi pour la traversée des quelques kilomètres de désert ouateux entre Briare et Beaulieu. Je suis assez contente que le chauffeur ait le grain de voix de la région. Nous nous ébahissons ensemble du paysage méconnaissable.
Beaulieu ouvre à peine ses persiennes. L’éclairage public se mouche peu à peu. Au pays de la boulangère de Beaulieu, les religieuses font vingt centimètres de haut, les éclairs trente de long, les pains au chocolat ont cinq fois la taille habituelle… Soit le boulanger a de très grandes mains, soit ces gens sont très amoureux, soit… sur le pont, j’entr'ouvre le sachet : en possession du plus grand croissant au beurre du monde.
Aujourd’hui, à l’école, nous allons écrire ! (Ma tête est un peu remplie de neige mais petit à petit nous décollons…)
J’ai choisi pour eux ce que les olympiques OuLiPiens appellent textes à contraintes — je leur explique ce qu’est une contrainte, et l’avantage de travailler avec la contrainte…
ACROSTICHES ! Les enfants écrivent chacun un vers de ces « poèmes à l’absent », dont le destinataire n’est autre que le vent. Ils ont une première lettre, quelques lettres à placer nécessairement, et la contrainte de ne pas utiliser le mot vent. Rien de plus simple pour certains… le vers coule de leur mine — une voltige, un fleuve, une floraison. Chacun a sa méthode, et sa façon de laisser vaguer son regard au plafond, sur la feuille ou dans le dictionnaire. Pour d’autres, c’est plus difficile… Il faut les emmener se balader, sentir le vent, en imagination.
POÈMES OSCILLATOIRES ! À partir d’un premier vers couplant un nom et un adjectif, les enfants composent un poème (2ème vers fait d’antonymes, 3ème de synonymes, 4ème d’antonymes encore). Nous nous perdons ensemble dans la forêt du langage et ses impasses, ses non-sens, ses incohérences.
Entre les mots, je leur montre le travail de Tim Knowles, Yves Klein, Bernard Moninot sur l’écriture du (par le) vent.
Ces quelques moments passent bien trop vite.
Les Ateliers Médicis seront fermés au public du 21 décembre au soir au 5 janvier inclus.