Pour la première rencontre en classe, nous avons discuté du sujet au coeur de ma résidence : l'Amour. Mon objectif était de sonder la gène ou non que peut susciter ce sujet. Les réactions étaient variées, du mutisme teinté de rougissements, à l'excitation totale et aux rires nerveux. Mais globalement, j'ai compris que les élèves avaient beaucoup de choses à dire, et qu'il ne fallait pas les pousser beaucoup pour qu'ils se lancent.
Lors du premier atelier, nous sommes donc entrés dans le vif du sujet : les mots d'amour. Ceux qu'on écrit sur un petit bout de papier, qu'on se fait passer en classe ou à la récré, etc. Il était important, pou moi, de commencer par la parole et l'écrit, avant de s'intéresser au Cinéma.
Comment parle-t-on d'amour ? Comment exprime-t-on ses émotions ?
Quand je leur pose la question: "Qui a déjà écrit un mot d'amour?", presque toutes les mains se lèvent. Je n'ai pas à faire à des débutants, certains sont même des spécialistes, comme M. qui "en écrit tout le temps!", me dit sa camarade dans un soupir. L'objectif aujourd'hui, écrire un mot d'amour à une personne imaginaire (ou du moins non nommée).
Pour s'aider, on réfléchit ensemble, en écrivant au tableau, à ce que l'on peut exprimer dans un mot d'amour. On parle de compliments, de comment on se sent avec la personne, ou quand on est loin d'elle. Les élèves parlent de sueurs froides, de chaleur, de mains moites et de gorges sèches, des yeux qui brillent... Ils commencent à écrire.
Plus l'atelier avance, plus je suis étonné de constater à quel point ils maîtrisent le discours romantique, jusque dans sa dimension tragique. L'Amour c'est absolu, c'est total, c'est pour la vie, et s'il le faut, on peut mourir d'amour.
En fin de séance, je leur apprends à utiliser un enregistreur zoom, puis ils s'enregistrent en train de lire leurs productions. Un élève fait le preneur de son, tandis qu'un autre lit son mot, et puis ça tourne. Au début, immanquablement, ça bloque un peu.
Écrire un mot d'amour, ça va encore, mais le lire devant toute la classe ?!
Mais finalement, on arrive à surmonter la gêne et la timidité et quasiment tout le monde lira son mot. C'était un exercice émotionnellement éprouvant, certains sont émus à la lecture de leurs mots ou en entendant les autres, quelques larmes coulent, mais au final, je crois que tout le monde est fier de ce qu'il a produit et de s'être jeté à l'eau.
