Carnet de voyage cousu dans des draps anciens et brodés.

Pendant que la terre décante, nous fabriquons nos outils pour les récoltes à venir

Publié par Morgane Lozahic

Journal du projet

 

 

Dans de vieux draps, plus toujours très blancs, nous avons découpé et assemblé les pages de nos carnets de voyage. Sur leur première page, nous avons brodé le nom de ce voyage « dans les plis de la terre ». Les fils s’emmêlent, s’échappent des chats des aiguilles, les patiences sont chatouillées.

Entre les herbes, nous apprenons le nom des adventices qui peuplent le gazon sur lequel nous voyageons. Nous sommes à la recherche de certaines plantes tel que la ronce, le noisetier, le plantain, la bruyère, le géranium-herbe à Robert qui sont tous riches en tannins. Les tannins sont des substances organiques contenues dans de nombreux végétaux. Ils sont produits par les plantes pour éloigner leurs prédateurs, mais aussi pour se protéger du soleil. Tannin vient sûrement du gaulois du mot « tanno» qui signifie « chêne». La poudre d’écorce de chêne, très riche en tannins, était utilisée pour tanner les peaux. Et oui tanner vient de tannin !

Les tannins nous intéressent pour leurs propriétés tinctoriales.
Nous étalons et classons nos bouquets de plantes tanniques en vue d’en faire des compositions sur des pans de nos vieux draps plus très blancs. Les compositions faites et le vent s’en mêlant, nous recouvrons nos ouvrages d’un autre vieux drap. Avec des marteaux, nous écrasons nos plantes entre les tissus pour extraire leur jus et ainsi leurs précieux tannins.
Dans un bac de soupe de clous rouillés (clous rouillés et vinaigre blanc) nous y baignons nos tissus martelés. Le jus des plantes petit à petit se noircit et apparaît alors leur empreinte ainsi que la mémoire de nos mouvements. C’est la réaction entre les tannins et l’acétate de fer de la soupe de clous qui produit la teinture.
C’est une technique très ancienne née en Corée et appelée tataki-zomé.

Nous avons cousu ensemble les morceaux de draps imprimés. Puis les avons redécoupés pour en faire des sacs de récolte. Les dessins de ces sacs sont nés des imaginaires foisonnants des enfants. Les coutures toutes en vagues content un joyeux apprentissage de l’usage de la machine à coudre.

Puis nous sommes de nouveau retournés entre les herbes et avons cueilli quelques-uns de leurs brins pour en faire de grands pinceaux feuillus.