Les pratiques sociales, les rituels et les événements festifs sont des activités coutumières qui structurent la vie en collectivité. Nous sommes persuadées que les formes urbanistiques, les échanges culturels, et les structurations autour de l’art sont essentiels à la vie de la cité car ils réaffirment l’identité de ceux qui les pratiquent. Ils permettent de structurer la vie d’une communauté pour faire perdurer son histoire et entretenir la mémoire commune de traditions ancestrales. Nous avons souhaité travailler notamment sur la thématique du carnaval, situation rituelle, qui crée son propre espace-temps hors du rythme ordinaire de la vie quotidienne. Cette situation permet de saisir l’identité comme une «performance» où les conventions et les règles sociales sont modifiées, bousculées et oubliées. Dans cet instant, une véritable médiation s’opère au sein d’une communauté qui n’existe de manière manifeste qu’en cet instant là. Comment se réalise cette médiation, avec quel matériel symbolique et quels individus ? Telle est l’interrogation que nous souhaiterions immiscer dans les pensées des élèves. En considérant l’événement rituel dans sa totalité, nous souhaitons co-créer une «parade carnavalesque». L’objectif serai de faire valoir l’importance des aspects symboliques, esthétiques et théâtraux du carnaval, afin que le moment du défilé, un sentiment fort et partagé d’unité s’opère. Nous accompagnerons les élèves à concevoir des propositions qui favorisent la mise en relation des habitants en un collectif médiatisé par des symboles reconnus comme communs, empruntés à des registres «identitaires» dont les origines peuvent être très diverses. Les élèves seront amenés à découvrir la symbolique du carnaval, ses origines, l’histoire de cette fête et les interprétations que celle-ci a suscitée sur leur territoire mais aussi dans les différentes cultures dont ils sont issus afin d’élaborer collectivement une proposition artistique de la «parade carnavalesque».
Le carnaval était une expression de liberté, de libération individuelle et collective qui supposait l’implication absolue de l’être social et de la mémoire historique. Aujourd’hui, il faut voir dans le carnaval une occasion de retrouver une unité entre différents individus, une célébration du partage et de l’échange.
Le carnaval était avant tout synonyme de masques. Aujourd’hui, le port du masque est devenu l’exception. La rupture est d’importance car le masque avait une valeur et une fonction qui permettait à celui qui le portait de devenir «autre», de s’élever au dessus des règles de tous les jours. L’individu en tant que tel n’existait plus, sa personnalité habituelle disparaissait derrière le symbole, pour lui même et pour les autres. L’anonymat plaçait sans ambiguïté le carnaval dans un espace et un temps qui lui sont spécifiques. Ainsi le carnaval était pour le peuple un moyen d’oublier sa condition le temps d’une fête et de se révolter contre une monarchie fictive où le roi Carnaval était mis à mort. Aujourd’hui, les symboles du carnaval doivent récupérer leurs traditions tout en les adaptant à notre société actuelle. Nous pensons que ce qu’il faut continuer à faire perdurer dans cette fête, n’est plus un débordement festif, mais plutôt un événement facilitant la rencontre et le partage entre différents individus en considérant leurs origines personnelles.
Le costume, tant qu’à lui, au sens où celui-ci signifie «déguisement», c’est à dire une dissimulation de ce que l’on est, a évolué dans de nombreux territoires en empruntant des formes inspirées en particulier d’une certaine culture historique, télévisuelle ou filmique. Tous ces «costumes» ont perdus leurs formes traditionnelles et ont perdus leurs symboles historiques. Ils correspondent à un vécu social différent mais qui ne portent malheureusement plus en eux les valeurs que peut avoir une communauté et ces traditions. Ils ne contiennent plus les mêmes sens et enseignements au niveau local. De ce point de vue, le carnaval est en train de perdre de son véritable intérêt culturel. S’il ne disparaît pas, il se transforme, dans certain cas, en fête folklorique. Le folklore permet au carnaval de garder son identité en attirant par ce biais de nombreux touristes curieux. Ainsi le carnaval se révèle être aussi un moyen de dynamiser des espaces urbains où le manque d’activités se fait sentir. Impliquer les élèves et les habitants dans cette fête permettrait de rétablir une envie de s’investir auprès des localités et de continuer a remettre en place certaines traditions culturelles qui font la richesse de ses localités et qui leur donneront un dynamisme et un intérêt parfois perdu.
En ce qui concerne les chansons, selon les traditions, elles ont une forme, un style qui leur est propre suivant le territoire. Les enfants auront la possibilité d’apprendre ces chansons et de les incarner durant la «parade carnavalesque». Une recherche sur les instruments utilisés durant les parades traditionnelles sera également proposée.
L’espace public est aujourd’hui un véritable terrain d’affirmation des identités et de leur mise en jeu. C’est le plus souvent au travers des expressions artistiques que se cristallisent les aspirations à se dire et à dire autour de soi son appartenance à un territoire et à une culture locale tout en prenant en compte les différentes origines de chacun. Le carnaval est justement à saisir comme un espace de rencontre entre son territoire, son identité, sa culture et la culture de ses habitants. C’est la communauté de l’instant et du mouvement, un moment de filiation, de mémoire qui fait fonction de médiation symbolique entre tous les présents.
Nous souhaitons intervenir lors d’une journée où il sera possible de l’appréhender comme une forme symbolique, une manière pour la communauté de se lier. Pour cela, Nous mènerons une recherche sur l’identification rituelle et sur une notion qui lui est liée, celle de la communauté qui se forme dans son contexte. Ce travail prendra forme grâce à la co-création entre les élèves, mais aussi les enseignants, et les habitants, d’une «parade carnavalesque», lieu où l’on peut mettre en scène des images de soi, ou des images d’un «nous», en utilisant un matériel symbolique disponible et soigneusement choisi ensemble : vêtements, couleurs, rythmes musicaux, pas de danse, textes de chansons et poésies, personnages mythiques locaux, etc.
En effet, nous proposons de repenser sur une localité une «Parade carnavalesque» qui tend à exprimer une réalité sociale, un fait historique ou encore un vécu culturel, qui peut même devenir une représentation symbolique annuelle. Pour ce faire, notre proposition ne se résume pas à dicter aux élèves ma vision mais à promouvoir la création participative et inviter les talents des élèves à s’exprimer, ainsi chacun pourra devenir acteur du processus de conception et de création de ce projet. C’est la participation de chaque élèves qui donnera au projet sa forme, son identité. Le résultat aura de la valeur parce que sa création aura été partagée. Ainsi, ce sont les processus collectifs mis en scène et pensés en amont qui définiront l’identité et la qualité du résultat final. En tant qu’œuvre collaborative, nous avons établi un protocole d’intervention, de façon à ce que les élèves puisse s’approprier mes recherches.
Lot-et-Garonne
Par le(s) artiste(s)
Les Ateliers Médicis seront fermés au public du 21 décembre au soir au 5 janvier inclus.