L'Attracteur de Météorites s'inscrit dans la genèse du spectacle To Die in Space, nouvelle création du futur Collectif Drive-in.
En s’appuyant sur les données répertoriées par le programme Vigie-Ciel de trois disparitions intrigantes de météoroïdes, ainsi que sur la chute d’une pierre incandescente dans le foyer de Elizabeth Hodges en 1954, il s’agira d’élaborer autour de ces faits réels différentes formes de fictions audiovisuelles et plastiques intégrées au territoire, où la frontière entre démarche artistique, scientifique et anthropologique se veut poreuse.
Entre création radiophonique, documentaire, cartographie et arts plastiques, L’Attracteur de Météorites propose intrinsèquement une réflexion autour des mythologies relatives à l’Espace, à sa conquête, et plus précisément sur la mémoire infinie véhiculée à bord de ces pierres de feu qui nous ramènent à la poétique de nos existences humaines.
Au moment où nous écrivons, une pandémie frappe de plein fouet la planète, subitement, et avec elle la moitié de ses habitant·e·s disparaît dans les murs des foyers devenus nos refuges. La majeure partie d'entre nous, les terrien·ne·s, n'avons pas eu le choix de vivre une expérience aussi agréable que déroutante : la dilatation du Temps. Une sensation qui probablement, nous propulse pour bon nombre dans les retranchements lointains de nos années d'enfance.
Deux ans plus tôt, en phase de recherche pour une nouvelle création nommée To Die in Space*, nous écrivions la trame suivante : “Une nuit, une météorite brise dans sa chute le velux d’une maison. Elle brise aussi l’enceinte qui séparait l’habitant du dehors. Elle brise encore le plancher qui isolait l’homme de la terre humide, pour y laisser un petit cratère incandescent. De l’impact s’élève un nuage de poussière suspendu dans la chambre. De la comète ne reste que le trou dans la vitre et le vide dans le sol.”
Une trame dans laquelle figure cet individu, coupé de toute forme de vie autre que la sienne et celle de sa télévision. Un environnement stérile, plat et maîtrisé, jusqu'au jour où y tombe une météorite sans âge qui ouvre une brèche sur le ciel et une autre au sol. Ce cratère fictif dans nos esprits, est devenu réel lorsqu'il y a seulement quelques semaines, deux faits historiques attirent notre attention : le cas de la météorite disparue du Mont Vaisi (env. 1637) et celui de Mme Elizabeth Hodges (1954), dont le foyer a été visé par une pierre incandescente venue de l'Espace. Tous ces événements et leurs temporalités bien distinctes ont fini par converger dans le projet L'Attracteur de Météorites pensé comme une partie intégrante de la création To Die in Space*.
Il s’agira donc d’élaborer autour de ces faits réels différentes formes de fictions audiovisuelles et plastiques intégrées au territoire, où la frontière entre démarche artistique, scientifique et anthropologique se veut poreuse. L’étude, l’utilisation et la déconstruction des codes du documentaire constituera la trame sous-jacente de notre projet de recherche.
Le sol français recense en effet le plus grand nombre de météorites par unité de surface et de population recueillies ces 100 dernières années. Le cas décrit plus haut de la météorite du Mont Vaisi - tombée dans les Alpes-Maritimes autour de 1637 - sera le point de départ de nos expérimentations puisque ni le cratère pourtant volumineux et profond, ni la masse rocheuse n'ont pu être retrouvés à ce jour. À partir de cette intrigue, nous ferons se confronter l’imaginaire vaste, libre et spontané des enfants à notre bagage artistique plus construit, où les outils de production audiovisuelle et plastique seront au service d’une réalisation hybride, volontairement ambigüe entre appartenance et émancipation d’un acte de mémoire. C’est précisément cette dissonance que nous voulons investir, convaincu·e·s de son intérêt poétique profond.
Parallèlement à une identité construite autour d’une démarche documentaire, Le Collectif Drive-in - dont le nom est tiré des premiers ciné-parcs - questionne plus généralement les mythologies engendrées par les médias et le cinéma. Parmi elles figure indiscutablement celle de la vie extraterrestre au sens large et c’est sur les corps célestes en particulier que nous choisissons de mettre le cap avec L’Attracteur de Météorites.
Avec pour but la réalisation de fictions audiovisuelles, il nous sera permis à la fois de décortiquer et donner à voir toute la machinerie qu’il peut y avoir derrière l’image télévisée qu’on nous sert comme une vérité. Plus que le produit fini, c’est l”envers du décor”, le processus de création d’une image cinématographique qui fait notre intérêt et que nous avons mis à l’honneur dans la nouvelle création To Die in Space*. Lors d’un long plan séquence tourné sur scène et diffusé/sonorisé en temps réel, les performeur·euse·s sont tour à tour sujets devant la caméra et acteur·ice·s du changement de plateau car la scénographie y est en constante mutation. Celle-ci engage une réflexion sur le voyage et les états multiples d’un paysage qu’il soit organique, virtuel, sauvage ou encore construit. Elle questionne le rapport que nous entretenons avec lui à l’ère du télé-transmis, de Google Maps, et de la ceinture de satellites qui cernent le globe terrestre où voyagent les big data. Ceux-là mêmes qui, semblables aux météorites, retombent embrasés à la surface du Monde dans un éternel cycle d’envoi et de retour.
Dans la continuité de cette réflexion autour de la cartographie, nous envisageons de restituer le travail de réalisation plastique et audiovisuelle sur une plateforme virtuelle interactive créée par nos soins : attracteurdemeteorites.com. Cet espace dédié concentrera notamment toutes les histoires et les lieux d’origine fictive des météoroïdes imaginés par les enfants.
En complément de cette restitution online, une exposition sera organisée sur le lieu d’accueil et seront présentés :
- les minéraux fabriqués par les enfants et leur cabinet de curiosité associé
- la fiche identitaire de chaque météoroïde sous forme de fictions audiovisuelles
- les archives collectées par nous deux sur le territoire durant la période de résidence
Nous souhaitons enfin pouvoir intégrer ce que nous aurons construit ensemble – aussi bien les météorites que les films et la carte interactive - dans le spectacle To Die in Space sous forme d’installation satellite autonome et offrir ainsi une seconde vie au projet L’Attracteur de Météorites.
* To Die in Space : représentation multimédias pour six interprètes associant art sonore, vidéo live, danse contemporaine et création numérique imaginée par le Collectif Drive-in entre 2018 et 2020. Première le 4 mai 2020 au Théâtre de la Renaissance d’Oullins - Reportée en raison de la crise sanitaire.
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