Depuis quand le Monde existe-t-il ? Comment s’est-il créé ? Et qu’est ce qu’il y avait avant le Monde, quand il n’y avait pas encore quelque chose, quand il n’y avait rien ? Depuis la nuit des temps, les humains ont cherché à répondre à cette question vertigineuse. Ce point d’interrogation sur nos origines a inspiré à nos ancêtres de nombreuses histoires. Autant de récits racontés de générations en générations, qui nous parviennent encore aujourd’hui avec toute la force des images qu’ils mettent en scène. Ces mythologies, elles habitent toujours notre imaginaire. Chaque civilisation, chaque territoire de notre planète a imaginé sa propre version de la création du monde. Celle que je vais vous narrer maintenant a été inventée par les Grecs durant Antiquité, il y a plus de deux mille ans. Voici donc, l’histoire !
Autrefois, Terre et Ciel étaient parfaitement collés l’un à l’autre, de manière à ce que ni le temps ni l’espace n’existaient encore. De cette union vint à être conçue toute une lignée d’enfants, titans et monstres, qui cependant ne pouvaient sortir du ventre de leur Mère. Les enfants grandirent dans le secret de la Terre, jusqu’à ce que le plus jeune d’entre eux ne mutile leur Père afin d’ouvrir une brèche vers le Monde, qui par ce geste fut créé.
Ce mythe grecque de la création du Monde a servi de trame narrative à la réalisation de deux grandes fresques collectives au fusain. Dans une salle occultée rejouant l’obscurité primordiale et souterraine, nous avons travaillé à l’aide d’un dispositif d’ombres projetées nous permettant l’agrandissement de formes et leur report au fusain. Nous avons commencé par implanter l’espace de la grotte, divisée en plusieurs chambres, à l’aide d’un dessin sur papier évidé. Nous avons ensuite réalisé des portraits photo des élèves afin de fabriquer des marionnettes à leur effigie. Nous avons ensuite utilisé ces « mini-mois » selon le même système de projection, afin de recréer la scène narrée dans le mythe.
Ce dispositif d’ombre projetées m’a été inspiré par le mythe de Dibutades (Pline l’Ancien, L’Histoire Naturelle), par l’Allégorie de la caverne (Platon, La République), par les thèses développées par Jean Clottes et David Lewis-Williams dans Les chamans de la préhistoire, ainsi que par les anciens dispositifs optiques de Camera Obscura.
Une jeune femme dont le père était potier passait une dernière nuit avec son
amoureux, qui devait partir en guerre au petit matin. Tous deux se promenaient dans
les ruelles étroites, éclairés par la flamme vacillante d’une torche. La jeune femme
remarqua que cette lueur projetait l’ombre de son amant. Elle se saisit donc d’un bâton de fusain, et traça au mur les contours de sa silhouette pour garder à jamais une trace de sa présence. Le lendemain, alors que le jeune homme était parti, le père de la jeune femme prit de l’argile et remplit avec l’intérieur du dessin. Il obtint ainsi
une sculpture ayant l’apparence du jeune homme. Il cuisit cette sculpture, qui fût
ensuite placée dans un temple en mémoire du jeune homme disparu.
Les élèves, à l'occasion de l'inauguration de l'exposition de leurs travaux au château de Lacapelle Marival, on présenté le processus créatif que nous avons mis en place et ont narré le mythe de Gaïa et Ouranos. Nous avions recréé l'ambiance lumineuse dans laquelle nous avions travaillé, et avions sonorisé leur micro afin d'imiter l'écho qu'on peut entendre dans les grottes.