Le golfe du Morbihan est une zone extrêmement riche en sites mégalithiques apparus au Néolithique. Cette période voit apparaitre la sédentarisation et ainsi, la construction des premiers villages, aujourd'hui en partie engloutis sous la "petite mer" (Mor-Bihan).
Le Village propose d’explorer ensemble les notions de territoire collectif, d’urbanisme et d’organisation d’espaces de vie à plusieurs notamment par le biais de visites de sites préhistoriques, d’enquêtes de terrain dans la ville, de relevés photographiques, d’ateliers de dessin et de cartographies.
En puisant nos influences dans une multitude de références, plongés à la fois dans les traces du passé et dans l’imaginaire déployé par les enfants, nous tenterons de créer un territoire fictif, inventé par la classe, qui prendra la forme d’une installation faisant dialoguer le diorama de ce territoire et les processus d’élaboration de ce village dont les enfants seront à la fois les urbanistes et les habitants.
Le village puise son origine dans la richesse des sites mégalithiques présents sur le territoire du Morbihan qui accompagnaient la naissance des premiers villages au Néolithique. L’idée est d’immerger les enfants dans cette période en leur faisant expérimenter le processus de sédentarisation à travers la construction de leur(s) propre(s) village(s).
En effet, près de 500 sites ont été répertoriés à travers le département, ce qui en fait une des zone les plus denses en vestiges Néolithiques à échelle mondiale. Bien que les théories sur la façon dont ces pierres ont été déplacées nous éclairent un peu plus, leurs tailles, leurs dispositions et tout simplement la raison de leurs présences constituent un halo extrêmement mystérieux qui continue de nourrir l’imaginaire des Hommes d’hier et d’aujourd’hui.
Quel impact ces mégalithes, ces menhirs, ces dolmens, ont-ils sur leurs voisins du quotidien ? Quels sentiments sont associés au fait de vivre dans un environnement aussi riche de fragments d’Histoire où certaines de ces pierres habitent parfois dans les jardins même de particuliers ? Comment se forge l’imaginaire des enfants dans une région si fortement emprunt de mystères et sur lequel l’univers fantastique n’a eu aucun mal à se greffer à postériori ?
La résidence proposera aux enfants de plonger dans leur imaginaire pour explorer les notions de territoires, de sédentarisation et d’enracinement.
Dans une première partie nous mettrons en exergue des indications historiques concernant la naissance des villages et des premiers groupements humains réunis en sociétés sédentaires.
À travers des recherches historiques, des relevés de traces, des photographies ainsi que la visite de sites mégalithiques et des musées préhistoriques présents sur le territoire, nous verrons comment les sociétés humaines ont donné différentes formes à leurs réunions à travers l’Histoire et comment ces formes ont successivement changés afin de mieux servir leurs objectifs respectifs.
Dans une deuxième partie, en interrogeant le rapport que chaque élève entretient à son propre village et environnement, nous nous réapproprierons plastiquement certains de ces éléments en vue de la construction d’un nouvel espace de vie fictif dont les règles seront établies collectivement.
Quels sont les déplacements dans leur village qui leur plaisent le plus ? Ceux qui leur plaisent le moins ? Y a t’il des éléments qu’ils n’aiment pas du tout ou au contraire qu’ils adorent ? Y a t’il des lieux où ils sont allés et qu’ils ont particulièrement apprécié ? Est ce que certains de ces endroits sont des lieux qui n’existent pas ? Qui sont virtuels ou cinématographiques ? Qu’est ce qui fait —selon eux— que l’on « prend racine » dans un lieu plutôt qu’un autre ?
Cette partie, plus empirique, permettra de mettre en lumière les affinités et les désirs de chacun sous la forme de dessins, de photographies et de cartographies. Cette base de travail et les réflexions qu’elle soulèvera révèlera les aspirations (écologiques, utopiques, dystopiques, etc.) des enfants, à la fois en tant que « futurs habitants » de leur village mais aussi et surtout comme futurs citoyens de notre planète.
C’est pourquoi l’espace-temps dans lequel ce territoire s’ancrera n’est pas défini en amont. C’est la classe seule qui décidera du visage qu’il prendra. Les élèves souhaiteront-ils transposer le village à l’époque du néolithique et donc le construire avec les matériaux de l’époque ? Tenteront-ils au contraire d’imaginer une ville côtière futuriste qui prendra en compte l’augmentation du niveau de la mer ? Quelle place prendra la technologie dans ce lieu ? Les envies individuelles devront donc être débattues entre les enfants afin de trouver une manière de faire un « territoire commun ».
Nous amorcerons dès lors la dernière partie du travail en tentant de penser tous les aspects de ce village ainsi que les différents rapports à prendre en compte dans le(s) dess(e)in(s) de celle-ci. Il faut en effet avoir en tête qu’une ville n’est pas seulement une forme matérielle. C’est aussi un phénomène social fort et complexe. L’urbanisation traduit donc nécessairement une manière de vivre en société, de s’ancrer dans le monde et de l’envisager.
Une fois les différentes règles sociales et politiques établies, l’aménagement des espaces dessinés et éventuellement le rôle de chaque habitant discuté, nous nous attellerons à représenter ce territoire géographique, avec ses habitations, ses chemins, ses espaces verts, etc. Une des formes finale de celui-ci sera un diorama, permettant à tou.te.s. de mieux se projeter dans l’idée de ce village.
La restitution finale fera ainsi dialoguer ce dispositif de présentation sculptural et les différents éléments (photographiques, picturaux, textuels) qui auront permis le processus d’élaboration de ce village, comme autant de traces de sédentarisation, d’enracinement et de démocratisation.
Ce projet de résidence s’inscrit ainsi dans la suite logique de ma recherche artistique portant sur le vivre ensemble et sur la gestion et l’écriture collective d’un espace. Il est notamment nourri par la série de cours donnée par Roland Barthes au Collège de France intitulée « Comment vivre ensemble » et par son concept d’idiorythmie qu’il définit en ces termes simples: « vivre ensemble à peu de sujets, peu d’individus et où chacun a son rythme propre ».
Cette exploration prendra ici la forme de la création d’un village par un groupe, symbolisant toutes les tensions et les inégalités sociales, politiques, culturelles, architecturales possibles au sein d’un territoire. Elle remet au centre les questions « Pourquoi et comment vit-on ensemble ? » que la crise et les confinements successifs ont soulevés à travers les exodes urbains massifs.
A travers cette expérience, nous favoriserons le travail en équipe et l’écoute des uns et des autres. En impliquant les enfants dans l’écriture de ce territoire qui serait à la fois le leur individuellement et collectivement, le projet a pour objectif de créer un espace de dialogue en sensibilisant la classe à l’importance de la diversité des points de vue et donc des représentations plastiques (une des notions fondamentale du cycle 3), tout en veillant à n’exclure personne.