Le projet "Fusions" est un travail de recherche sur l'hybridation des musiques électroacoustiques. Ce travail vise à imaginer de nouvelles formes d'ensembles musicaux qui mêlent les instruments analogiques et numériques pour interpréter des créations électroacoustiques originales. Les artistes associés au projet - compositeurs et compositrices de musique électroacoustique - seront invités à expérimenter, et à proposer des compositions musicales pour la formation proposée, ou un sous-ensemble de celle-ci. Visant à réinventer la manière dont on "joue" de la musique, mais aussi la manière dont on l'entend, le projet Fusions sera enrichi par les propositions artistiques de la très jeune création - les élèves de l'école d'affectation - qui seront accompagnés par les artistes invités pour mettre le pied à l'étrier de la création contemporaine. L'ensemble de ce travail sera documenté par des écrits, partitions, photographies, et autres documents.
La grande diversité des musiques électroacoustiques propose un terrain d’exploration privilégié pour les artistes et compositeurs. L’association entre la musique électroacoustique sur support et les formes « live » de ces musiques est l’un des terrains les plus actifs et les plus fructueux de la recherche musicale de ces dernières années. En effet, cette association met en jeu de nombreuses singularités sensibles inhérentes aux différents médiums utilisés : son enregistré, synthèse sonore live, paysage sonore, enregistrements de la voix, archives sonores, spatialisation du son, etc. Le projet proposé vise à associer la recherche sur l’hybridation en composition de musiques électroacoustique à un dispositif pédagogique de création.
Ce projet proposera une extension du duo HYDRA SUPERCLUSTER, ensemble de performance électroacoustique qui, depuis 2020, a travaillé activement sur les passerelles existantes entre les différents modes d’hybridation de ces musiques. Ce noyau de deux compositeurs est par essence protéiforme et se transformera en un ensemble plus vaste, comprenant 5 musiciens et musiciennes issues de la création électroacoustique. Cela permettra d’élargir le spectre de nos recherches sur l’hybridation, par l’association de différents instruments électroacoustiques : live coding, synthèse modulaire, instruments hybrides analogiques et numériques. On interrogera d'autres manières de "jouer" la musique, d'interagir entre musiciens (interagir par le geste, ou par des signaux électroniques...), mais aussi d'autres manières d'écrire ces musiques et d'interpréter ces partitions. Nous travaillerons à l'élaboration d'une forme-concert hybride lors d’une résidence de création qui aura lieu dans le département où se situe l’école à laquelle nous serons associés. Cela permettra, dans la mesure du possible, d’envisager une visite des élèves sur le lieu de résidence. La restitution sera composée des plusieurs créations musicales commandées pour l'occasion. Ces dernières seront réalisées par les compositeur et compositrice associé·e·s au projet. Une restitution publique - sous la forme d’un concert - sera proposée, permettant aux élèves et à leurs familles d’avoir un accès direct au fruit de ce travail, et de renforcer les liens qui connectent les familles, les élèves, et le monde de la création musicale électronique. Il me paraît essentiel de mettre en oeuvre toutes les médiations possibles pour que ces rencontres soient vecteur de lien social.
Les séances pédagogiques à l'école s’élaboreront en plusieurs étapes. Je serai accompagné à chaque séance d’un des musiciens de l’ensemble étendu HYDRA SUPERCLUSTER, ce qui permettra d’apporter différentes visions, pratiques et expériences aux élèves.
Tout d’abord, il s’agira de proposer un tour d’horizon – une découverte – du champ des musiques électroacoustiques. En passant par des séances d’écoute, nous proposerons des moments qui associent la parole des élèves (leur interprétation, leur écoute) à la transmission de certains éléments d’initiation à la formation de l’écoute (description d’un son, d’une forme musicale). Cette première phase permettra aux élèves d’acquérir les quelques notions fondamentales à la pratique électroacoustique, ainsi que la connaissance de quelques musiques de référence. Ce sera également l’occasion de nommer les sons, donc de poser des mots sur cette matière éphémère qu’est la musique. Ce premier pas est essentiel à la mise en œuvre de la seconde étape. Celle-ci consistera à mettre en place un dispositif d’expérimentation du son. A l’aide de quelques instruments électroniques contrôlables par des dispositifs simples et intuitifs (capteurs de mouvements, joystick, manette de contrôle), nous proposerons des travaux d’improvisation et d’écoute en petits groupes. Ce travail sera l’occasion d’associer « l’entendre » au « faire », et permettra aux élèves de s’approprier une pratique gestuelle associée à l’action musicale. Cette approche par l’improvisation n’est pas un fin en soi, mais permettra à chacun de se forger une expérience de la fabrication de son dans un contexte musical. De nombreux outils pédagogiques - comme les cadences d'improvisation d'Alain Savouret - pourront être utilisés et revisités pour faciliter cette étape de travail, qui doit permettre de libérer le geste musical et l'écoute. Durant cette phase, nous proposerons aussi l’expérience de la prise de son microphonique, en invitant les élèves à enregistrer des sons puis à les réécouter en groupe. Cette expérience fondamentale permet de mettre en évidence la nature musicale du son enregistré : jeux vocaux, percussions, sons naturels...
La troisième étape de ce travail pédagogique proposera la formation de petits groupes parmi les élèves (3 à 5 par groupe). Ces groupes travailleront ensemble à la réalisation – accompagnée – d’une création électroacoustique hybride (associant au moins deux types d’instruments électroacoustiques). Libérés de la contrainte technique – que nous assurerons quand c’est nécessaire – ils seront alors libres d’imaginer une petite forme musicale et d’œuvrer à sa réalisation. Lors de cette étape de travail, les élèves seront invités à proposer des imageries poétiques qu’ils souhaitent mettre en musique – soit sous la forme d’histoire, ou sous la forme d’intentions poétiques plus globales. Cette étape se clôturera – si possible – par une restitution, soit en public, soit en interne devant les autres élèves de la classe ou de l’école. Celle-ci prendra la forme d'un concert durant lequel les élèves seront amenés à jouer leurs créations. Il serait idéal qu'une restitution des élèves puisse aussi avoir lieu en première partie de notre représentation, afin de proposer un concert véritablement hybride et d’offrir aux élèves une expérience de la scène.