Tenues (de combat)

Combien de temps faut-il pour que nos coutumes disparaissent, pour qu’on les oublie ? Combien de générations ? Que faut-il abandonner pour s'installer ailleurs, dans un autre pays, ou dans un autre lieu de vie ?  Pouvons-nous créer des situations qui nous permettent de renouer avec des gestes anciens ?
Charlotte El Moussaed réfléchit sa pratique en lien avec les coutumes, les costumes, les habitats ou les habitudes. La racine commune de ces mots, leur proximité phonétique est le signe qu’il faut les combiner. S’abriter, habiter, s’habituer, s’habiller, des habitudes.
Elle travaille en lien étroit avec ce qu’elle vit, avec ses origines, et s’interroge sur les différentes représentations de nos histoires inégales.


Née en France d’un père marocain et d’une mère chilienne, ces histoires ne la quittent jamais. En questionnant le départ du pays d’origine à l’âge adulte, invitant à recommencer ailleurs, parfois à l’autre bout du monde, Charlotte questionne aussi le départ du lieu de vie personnel pour intégrer un espace de vie collective pour personnes âgées : quelles conséquences dans l’usage des objets du quotidien ?  Quels peuvent être les refuges aujourd’hui ? Où trouver un espace rassurant, un heureux rassemblement, des espaces de repos ou de confiance ? Est-ce que le souvenir des gestes qui nous ont été transmis, même les plus légers, est-ce que ces gestes-là sont déjà un refuge ? La mémoire d’une caresse, d’une coiffure, d’un vêtement qu’on répare ? Dans les synonymes de refuge on trouve : asile, retraite, hospice, accueil, hôpital. Qu’emporte-t-on avec soi dans un refuge ? Qu’est-ce qu’on ne prend pas ? Quand les objets ne nous ont pas suivi, existent-ils encore quelque part ?
Qu’ont à raconter nos aîné·e·s sur ces gestes-là ? 
À l’occasion de ce projet de recherche et de partage, Charlotte souhaite fabriquer des photographies où des gestes performent ces bouts d’histoire, ces mouvements du vêtement, dans les possibilités du présent de leur corps peut être fatigués.
 Durant ces ateliers, Charlotte et les participant·e·s fabriquent des images et des sons qui donnent à ces récits une place de sujets, en intégrant les parts manquantes, comme on reprise un vêtement troué.