Intérieur jour

Qu’est-ce que l’on ressent lorsqu’on arrive dans un Ehpad, qu’on doit l’envisager comme sa nouvelle maison, une grande colocation dans laquelle il faut respecter les heures de soin, de repas et de temps commun ? Quels sont les nouveaux bruits, ceux qui nous deviennent
familiers, ceux auxquels on peine à s’habituer ? Comment nous parvient le monde extérieur ? A-t-il un impact sur nous, avons-nous un impact sur lui ?
Adèle Edwards et Valentin Fleury proposent avec Intérieur Jour la création d’une webradio au sein de l’Ehpad Saint-Joseph. Cette exploration sonore s’articule en plusieurs étapes : d’abord, le temps de rencontre avec les résident·es dans leur lieu de vie, où l’on apprend à écouter sa voix et à enregistrer son quotidien. Ensuite, la mise en place de plateaux radio et d’ateliers de création où les résident·es et le personnel sont invité·es à réaliser un programme radiophonique. Toutes les prises de paroles sont permises.
On y parle des vedettes des années soixante-dix, des corps qui fatiguent mais aussi du restaurant de l’Ehpad et des rendez-vous à ne pas manquer. Les résident·es élaborent des playlists, imaginent le design sonore des émissions ; ils construisent un monde dont ils donnent le tempo, et partagent aux auditeur·rices leurs anecdotes, leurs traits d’humeur et leurs digressions.
Petit à petit, des rituels se créent, une forme se distingue : les chroniqueur·reuses habitué·es accueillent les contributeur·rices plus occasionnel·les et invitent les timides qui n’osaient d’abord pas s’asseoir autour de la table. Les rubriques s’enchaînent : on fabrique les jingles, on réécoute les extraits des émissions précédentes, on commente les sons captés par Valentin et les photos argentiques prises par Adèle qui mêlent clichés du plateau radio, instantanés de Saint-Joseph et visages de celles et ceux qui l’habitent. Au fil des émissions, l’équipe gagne en assurance, en verve et en confiance : les voix sont bien timbrées, les casques positionnés avec plus d’assurance. Tout commence à mieux sonner.