CHEMINS CROISÉS
De la matérialisation d’un espace composite au tissage d’un entre-paysages
Ce projet se situe dans la continuité et le prolongement d’une recherche autour du paysage vécu, de sa représentation et de son écriture collective dans une géographie sensible et en mouvement.
Chemins croisés propose une réflexion sur l’hybridation des surfaces dans la création d’une représentation. Cette notion convoque l’idée d’une relation entre deux espaces, deux moments ou deux entités, il s'agit donc de la création d'un paysage multiple, à la jonction entre les lieux et les temps, une manière de reconstruire ensemble un espace dans ses diverses strates et interprétations liées.
J'aimerais travailler avec des personnes migrantes pour leur rapport personnel et singulier à la notion d'espaces, de parcours et de mémoire des lieux.
Nous allons démarrer par une observation subjective d'une portion de territoire afin de réaliser une collection de photographies au sténopé qui évoquera pour chacun.e quelque chose de l'ailleurs. Cheminer dans des espaces choisis ou prend sens le détail, la moindre lumière, pour faire surgir des zones de convergence, des échos, des résonances entre différents lieux traversés.
Chemins croisés nous permet de trouver les liens plutôt que de pointer les différences, une manière d'aborder l'appropriation du lieu de façon positive et évocatrice, socle de cette proposition artistique partagée.
À cette collection d'images viennent se superposer dessins et mots par le biais du transfert, de la gravure, du gaufrage et autres techniques de création d'images imprimées ou indirectes.
Nous travaillons sur une même unité de format, une série de "pages vierges" qui pourront in fine, être mises bout à bout, superposées, assemblées. À la croisée entre livre d'artiste(S), carnet de route et atlas imaginaire, cet ouvrage relié à la main va permettre une lecture nouvelle du paysage par le biais d’un langage artistique, poétique et personnel.
Toutefois, ici l'important est moins l'ouvrage, le résultat, que le travail effectué pour y parvenir. Le processus, l'écriture collective de ce paysage est l'identité même du projet et je ne peux donc présupposer à l'avance d'une forme totalement définie.
Le dispositif Transat, par une formule de présence prolongée au sein d'une structure non nécessairement dédiée à l'art, combine création, rencontre artistique et transmission, trois axes forts de mon engagement artistique déployé jusqu'alors.
La résidence est donc consacrée à la rencontre avec les personnes, à l’exploration du territoire, à la photographie de celui-ci, à la collecte de mots et d'histoires et aux résonances possibles. L'idée est d'investir un espace dédié afin d'installer et laisser se dérouler un travail "work in progress", un laboratoire artistique permettant la transmission, l'expérimentation de techniques artistiques mais également un espace de rencontre, de dialogue et de croisement.
Ce projet "fictionne" autant qu’il dit, il s’agit d’une interprétation, de la création d’un entre-langage. De cette expérience partagée va émerger une nouvelle identité visuelle hybride, pénétrant dans les différentes couches que représente le réel et dont la vocation est de circuler de la réalité à la fiction, de l’individuel au collectif, d'hier à aujourd'hui.
Delphine Tambourindeguy – chemins croisés
Résidence Transat 2021 – 15 août > 5 septembre.
La Terre en partage, accueil innovant, actif et constructif des demandeurs d’asile, maraichage biologique
Installation d'un " atelier artistique ouvert " dans la salle d'activité de l'association pour 3 semaines afin de proposer rencontre et pratiques autour de la création d'un portrait composite et collectif du lieu.
Après quelques jours de familiarisation pour tous et toutes, nous choisissons de travailler de manière informelle pour la conduite de cette résidence : pas d'ateliers ni d'horaires précis mais une présence forte de l'artiste dans les temps de vie collective puis des invitations, des incitations ou simplement des manières de montrer, raconter, échanger et éveiller la curiosité. Des mots simples, des gestes et différentes exploration du " faire-ensemble " pour dépasser la barrière de la langue et communiquer !
Le travail photographique au sténopé constitue le fil rouge de la création avec une exploration minutieuse des lieux, à la recherche d'espaces, de points de vue et autres surprises de terrain.
Un petit laboratoire photo a été installé sur place avec l'aide des résidents dans un local de stockage nous permettant de développer directement les prises de vue de manière autonome ou accompagnée.
De cette large collection étoffée au fur et à mesure des photos, idées et rebonds a émergé une sélection finale.
La dernière semaine a été consacrée aux tirages photographiques : numérisation et tirages jets d'encre mais aussi cyanotypes et antotypes à base de végétaux de saison ; mûres, blettes et tétragone avec insolation à la lumière du soleil.
La production finale dresse un portrait sensible du lieu et de ses occupant.e .s. Le passage successifs par divers procédés photographiques alternatifs anciens mais aussi numériques actuels donnent son identité à l'ensemble. Inversion de la symétrie, négatif, effet fish-eye accentué par les boites rondes dans lesquelles ont été construits les sténopés, impressions numériques, enductions végétales... participent d'une perte de repère des lieux autant que d'une singularité affirmée.
Au delà de la production, la rencontre et l'humain auront été les moteurs de cette co-création. L'ensemble des temps partagés, informels ou non, du quotidien comme de la création artistique participent de cette résidence et en font le sens.
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30 explorations des lieux et du jardin
30 conversations et plus ...
30 repas partagés
30 parties de rumikub !
30 photographies
30 participant.e.s / co-créateurs : Abdul Djalil, Adama, Ahmad, Ali, Boris, Clémence, Hélène, Jean-Luc, Delphine, Hassan, Hussein, Nathanaël, Nine, Rajab Ali, Régina, Samba, Théophile, Valentin, Walid